En cet instant où tous ses sens étaient emplis d’une douceur inédite, en cet instant où rien n’avait vraiment d’importance puisque rien ne l’attendait nulle part. C’est lui qui attentait de la nuit tourbillonnante au dessus de sa tête qu’enfin elle arrive sur lui. Il voulait savoir ce qu’était cette tornade, ce qu’elle renfermait comme secrets, comme puissances, comme richesses. Il voulait savoir ce que cachait ce mélange de pluie, de nuages et de vents. Cette comète blanche qui manifestement le cherchait, se dirigeait vers lui et qu’il n’envisageait même pas d’esquiver ou d’éviter. Il échafauda des plans et des utopies sur ce phénomène. Tout se passait en quelques secondes et pourtant, il prenait le temps de visualiser toutes les images que son armoire ouverte lui envoyait. Il voyait tous les abandons et il remarqua qu’ils étaient tous féminins. C’était son histoire mais elle était remplie de femmes qui l’avaient laissé. Elles n’avaient pas eu tort, elles n’ont jamais tort. Il en était ainsi parce qu’il n’avait pas été capable de les retenir. Il n’avait pas réussi à s’opposer à la mort, à l’abandon, la trahison.
Tous les prétextes furent bons pour qu’il se sente rejeté et pourtant, malgré tout, encore, toujours, il avait essayé. Il avait tenté de trouver celle qui resterait, celle qui serait là, quoiqu’il arrive et cette quête n’avait conduit que de nouveaux échecs, de nouvelles déceptions. Il avait trop attendu des sentiments, trop espéré de la pureté du cœur et aujourd’hui, enfin, il comprenait.
Il était mû en toute circonstance par cette force d’amour qui brûlait en lui. Il ne cherchait plus sa mère, il ne cherchait plus une maîtresse ou une amante. Il était prêt, enfin, à faire la rencontre. Celle qui fait que soudain la vie prend un vrai sens, celle qui donne l’énergie nécessaire pour supporter la faim, le froid, la chaleur, la crasse, le vent, la soif. Ce n’était pas de sexe dont il avait besoin, ce n’était même pas d’amour finalement. Il avait besoin de pouvoir lâcher prise. De sentir qu’elle l’accompagnerait, qu’elle était vraie, réelle, qu’elle disait vrai, qu’elle irait vraiment au bout de tout avec lui et pas seulement parce qu’elle le disait, il préférait même qu’elle ne le dise pas, mais qu’elle y aille vraiment. Il voulait désormais l’absolu, le complet, le parfait et il était prêt. Il s’était trompé souvent, toujours. Il avait cru et sans doute, elles aussi mais elles se mentaient, elles lui mentaient. Il avait reçu les reproches récurrents de ne pas donner, de ne pas exprimer les sentiments. Il avait refusé les épanchements.
Longtemps, souvent. Il était resté sur cette ligne de ne pas faire croire les châteaux en Espagne et les merveilles des autres mondes si rien de tout cela n’était possible. Souvent, il s’était tu. Souvent, il avait subi les foudres et les reproches mais il n’avait jamais menti sur les sentiments et c’était la seule fierté qu’il lui restait. Il avait même préféré faire croire à l’absence de sentiments s’il n’était pas sûr de vouloir partir au bout des mondes avec elle. Il avait appris et il avait pris ce que le monde plaçait devant lui mais il avait toujours brûlé de ce feu intérieur, de ce besoin d’amour, de se sentir vivant et rempli, d’être essentiel mais il n’avait jamais passé la barrière de l’être important sur le moment. La femme aux yeux verts représentait tout ce qu’il avait voulu aimer, toutes les parts de toutes ces femmes de sa vie qui l’avaient laissé sur le bord de la route.
Elles étaient en elle. Elles étaient elle. Elle était devenue la personnification de tout ce qu’il avait rencontré de beau, de doux, de magique chez toutes les femmes. Il avait affronté ce désir et il s’en détachait puisque, enfin, ce qu’il avait toujours cherché, existait et il ne l’aurait jamais. Il avait compris que l’amour absolu existait, qu’il était incarné en elle mais qu’il ne l’aurait jamais. Il n’y avait pas droit.