Un jour j’étais roi… partie 4

Mes armées avaient été défaites sans combattre, décimées, décapitées. J’avais posé les armes à faire confiance quand je n’aurais pas dû et soudain, je me surprenais à repartir sur les routes sinueuses des histoires vouées à l’échec. Je savais que cette fois, je n’avais rien à perdre. Je n’étais plus que l’empereur de mon propre monde après avoir cru être le roi d’un continent.

On me l’avait fait croire, et je l’avais cru et je m’étais trompé. Et maintenant, je pouvais enfin dire, sans retenue, sans peur, sans mesurer le poids de chaque mot, que je t’aime tellement. Que même sans te connaitre, je t’aime déjà comme on ne m’a jamais aimé. Je mélangeais mon sang à mes larmes du passé pour inonder mon ancien royaume de toutes les souffrances endurées et voir s’ouvrir les portes d’un monde inconnu, ton monde. Je pouvais suivre les routes que dessinaient tes doigts sur le sable des fondations de mes palais d’antan. Je pouvais suivre le feu de tes yeux creusant les roches, ouvrant les chemins vers les ailleurs idylliques. Je pouvais enfin pouvoir, je voulais enfin vouloir et ne plus être seulement ce qu’on avait fait de moi. Je pouvais être toi comme je voulais que tu sois moi. Je pouvais enfin être le sentiment qu’on m’avait toujours refusé Tu devenais les possibles, tu devenais le vrai, tu devenais les mers au milieu des océans. Tu devenais l’essentiel que personne n’avait jamais voulu être parce que tu faisais de moi l’essentiel que personne n’avait jamais voulu faire de moi. J’étais enfin important, vrai, réel pour quelqu’un, et ce sentiment changeait toutes les faces du monde. Cette découverte d’un monde nouveau, inconnu, riche d’impossibles devenus joyaux faisait enfin, de moi, un roi.

Avant j’étais roi, désormais je devenais le roi et je t’aime tellement. Les forêts brûlées, les villages ravagés, les maisons incendiées, les hommes éventrés, les femmes gorgées, les enfants pendus, les vieillards jetés des ponts, toute ma déchéance disparaissait quand tu posais sur moi ce regard aimant. Ce regard qui répond qu’il te désire tellement avant même que tu n’aies pu dire, crier ton amour. Ce regard qui devance toutes tes pensées, ce regard qui devance toutes tes envies, ce regard qui fait de toi un être complet, ce regard qui n’existait pas et qui devenait le diadème du reste de ma vie.

C’est parce que tu ne devais pas venir, pas maintenant, pas là, pas dans cette vie, que tu es apparue. C’est parce que je n’étais pas prêt que je pouvais te prendre la main comme j’ai toujours rêvé de le faire et comme je me suis toujours interdit de le faire. C’est parce que tu ne peux pas exister que tu es là maintenant. C’est parce que je ne suis plus roi que tu es mon royaume. C’est parce que je suis vide que tu es mon empire, mon tout, mon monde, ma vie, ma mort et tout le reste. Avant toi, j’étais roi, j’ai eu cette vie factice, faite de mensonges. Depuis toi, je suis immortel. Je continuerai de vivre dans un cœur qui bat, même après moi, même après les mondes, même après les après. Ce que ton regard m’aura donné vaut plus que ma vie. Tu es le sens, tu es le sang, tu es la raison, tu es ce qui purge le passé, tu es ce qui construit l’avenir, tu es ce que personne n’a jamais voulu être, tu es ce qui ne devait pas être, tu es ce qui est. C’est parce que je ne suis plus roi que tu es mon royaume et je t’aime tellement plus encore que ça et je te veux tellement plus que ça.

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