Parce que j’avais toujours voulu me dire que quelqu’un serait capable de gravir les plus hauts sommets pour moi et de nager à travers toutes les rivières juste pour moi. Juste parce que c’était moi. Et à force d’attendre ça, d’espérer ça, de croire en ça, je m’étais retrouvé sans espoir finalement. Ça n’arriverait pas. Ça ne pouvait pas m’arriver. Je m’étais perdu dans ce rêve, dans cet espoir mais ça ne pouvait être moi. Ça n’était pas pour moi. Il fallait que je vois tout ce que j’avais cassé et que je le vois entièrement et cruellement. Et brûler comme des champs de blé en plein hiver. Longtemps, j’avais perdu le sommeil dans cette quête et j’étais resté le souffle court, coupé, cassé. Pourtant, je continuais de chercher et de croire. J’avançais vers cette inconnue qui ne venait pas et je me disais que j’aurais voulu être la raison, le sens, la cause alors que le plus souvent, en fait, toujours, j’étais le prétexte. Et se laisser ensevelir dans les eaux sortant des lits des rivières.
J’avais rêvé de nuits entières à boire des verres et vider des bouteilles, à refaire des mondes, nus, devant des feux de cheminée. Je nous avais vus lumineux, étincelants. Je m’étais même trouvé beau.. Je m’étais aimé dans mes rêves à deux. Je m’étais trouvé valable comme raison. Et se couper soi même les ailes pour être l’ange déchu de sa propre existence ou de ce qu’il en reste.
Et puis, il m’aurait fallu remonter le temps, faire tourner les horloges dans l’autre sens et m’assurer de ne pas tomber dans les ténèbres. Et j’ai passé des heures et des heures à regarder l’eau ruisseler et ne pas voir que j’avais besoin d’être ça, d’être l’essentiel et de ne plus être le détail m’avait coupé de tout le reste et même de moi. Et malgré tout, et malgré ça, et malgré moi, je ne me suis pas tué.