Ça tourne, ça tourne mais il ne se passe rien…
Encore une journée avec son lot de manifestants, encore une journée avec un député ou ministre qui sortira une ânerie plus grosse que lui ou elle, plus méprisante que la connerie précédente, encore une journée où on essaiera désespérément de nous faire croire que les élections à venir ont une importance stratégique majeure, alors que la compréhension de l’inutilité de la chose est désormais manifeste et acquise pour le plus grand nombre, (si l’on excepte les fous de dieu de tous bords qui pensent encore que voter changent quoique ce soit).
Encore une journée où en réalité, le véritable intérêt sera de se savoir enfin si le Bayern ou Barcelone vont réussir à tuer le championnat, et ça ne sera, finalement, même pas sûr.
Encore une journée où la question, pour les gens qui ont de vraies priorités dans la vie, ne sera pas de savoir si Blanche Neige a réussi à convaincre les personnes qui, de toute façon, avaient déjà prévu de voter pour elle, mais bien de savoir, si on va trouver du boulot pour enfin retrouver le statut d’esclave qui permet de survivre.
Encore une journée où tenter de se souvenir du nom emprunté à Maupassant du candidat de droite passera après l’interrogation sur l’organisation des repas à donner à ses gamins, qu’est ce qu’on mange, combien, quand. Et si on pourra, un jour, grailler autre chose que des tartines au pain ou des pâtes au beurre, sans beurre. Et pas parce qu’on est au régime.
Encore une journée où savoir si Barbarossa a 25 ans ou moins, ou plus, traversera l’esprit de quelques graphologues moralisateurs, dans d’obscures salles de rédaction, qui n’ont rien d’autre à faire que des papiers insipides, sur des gens insipides alors que Mamie crève à l’EPADH et qu’on n’a pas de solutions pour se soigner cette putain de dent qui se meurt, elle aussi.
Encore une journée où il faudra faire des kilomètres en bagnole, pour que les gamins ne s’ennuient pas devant les écrans parce que les écrans, c’est mal, mais comme le géant vert veut faire de l’UE, un truc vertueux, ça va vite aller mieux puisqu’on aura une nouvelle taxe à payer donc on sera définitivement condamné à économiser l’argent qu’on n’a pas, et qu’il sauvera le monde avec ses petits bras musclés, contre le monde entier lui-même. Les écrans, c’est mal mais quand il n’y a pas les moyens de payer des activités, à l’autre bout du département et que la pluie tombe sans cesse sur la banlieue oubliée, il ne reste que ce que le monde marchand et la grande consommation offrent comme alternative et comme il est interdit par les conventions de Genève, Lisbonne, Paris, Ouistreham et le Puy en Velay de s’ennuyer dans ce monde sur actif, il faut parer au plus pressé et le plus pressé, c’est le mal. Toujours.
Le pauvre n’a qu’à se sortir les doigts après sa semaine sur sa machine infernale pour aller à la médiathèque gratuite de la préfecture à 25 bornes de chez lui, avec la voiture électrique qu’il ne peut pas se payer et surtout, surtout, il se tait! C’est bien sa faute s’il habite au milieu de nulle part et s’il est trop con pour refuser de vivre dans une cage à lapin de 17 étages avec 2 ascenseurs à un prix exorbitant.
C’est quoi ces gens qui gagnent 1300 balles et qui refusent d’en mettre 800 dans un deux pièces dans le 19 ème… Bande de Konnards! Même Benji Griveaux, élevé sous la mère, n’a pas les moyens d’acheter sur Paname alors les lendemains qui déchantent des salauds de pov qui n’ont rien à bouffer, faudrait vite voir à revoir les priorités…
Encore une journée où il va falloir se coltiner les messages des infos qui, en boucle, feront le récit ou plutôt le panégyrique, d’une majorité totalement hallucinante de bêtises et d’incompétences et dont Loiseau, qui aurait mieux fait de rester dans son nid, n’est qu’un exemplaire fade et terne. Même dans la médiocrité, elle ne parvient pas à être la meilleure.
Encore un jour où des bandeaux passeront partout pour nous rappeler que Jean Totophe Lagarde erre, encore, dans les coulisses, à la recherche de la sortie de ses propres tunnels pendant que le nombre de sdf et sans abris divers et pas trop variés, s’approche quotidiennement du million comme scanderaient les inconnus qui ne le sont plus, à force de tourner sur les ronds points.
Encore une journée où Raphi va se demander s’il doit porter le pull marron ou la chemise bleue et ce qu’il allait faire dans cette galère, finalement, alors que la plupart se demande encore pourquoi ils se sont levés ce matin et dans quel état ils se coucheront ce soir. Chacun ses questionnements internes.
Encore une journée où les travailleurs vont se demander quand leur usine sera délocalisée ailleurs, moins cher, plus loin, pendant que Ian prendra l’avion, non plus pour le Cap Vert ou Cuba, cette fois, mais, lui aussi, ailleurs, loin, toujours plus loin des gens qui souffrent parce que tous les travailleurs de France n’ont pas la malchance d’être exploités dans l’Hyper Casher et forcément, c’est moins bankable quand tu n’es qu’un petit trou du cul qui se demande le 4 du mois comment il va tenir jusqu’au 25… Le 25 parce que tu peux tenir une semaine sans bouffer, mais trois semaines, ça commence à devenir très long…
Quoique, en partant maintenant, il est possible d’atteindre l’hôpital le plus proche, dans trois semaines, pour avoir une perfusion d’eau sucrée. Mais comme il faut rester dans l’UE coûte que coûte, c’est que tout va bien et que les travailleurs ne doivent pas vraiment souffrir.
Il est des priorités que les pauvres gens, les simples d’esprit, les non valorisés par les diplômes ou les héritages, les courbettes ou les génuflexions et pas forcément à caractère sexuel, ne peuvent pas comprendre du bas de leur médiocrité. L’UE, c’est la paix et démerdez vous avec ça.
Encore une journée où les gens vont se demander où accoucher, où avorter, où mourir, où bouffer, où rire, où se détendre, où simplement vivre pendant que Benji genère actions propose 500 milliards pour sauver la planète, depuis Bruxelles, parce que New Delhi, c’est trop loin et que Pékin, c’est trop dangereux pour changer vraiment les choses. Alors, il croit et veut faire croire que depuis notre petit jardin voltairien, chacun changera le monde. Cultivons avant qu’on nous cultive.
Encore une journée sur terre où les politiciens feront croire qu’ils se préoccupent de ce que nous sommes, de ce que nous souffrons, chacun dans nos coins, malgré les manifs et les ronds points.
Encore une journée où l’alternative sera, pour cette classe politique, de se demander, comme le fait le fils de Moustic ou de l’Union Pour Rire, s’il faut rester dans l’UE ou en sortir alors que la plupart d’entre nous ne sait pas ce qu’il dira à ses gosses quand, pour la xième fois, il devra refuser d’acheter le jouet fabriqué, en Chine, à 3 euros, qui traîne dans les étals des supermarchés low cost parce que c’est soit le jouet, soit deux repas…
Et la larme à l’œil, parce que ça ronge de s’entendre dire non à son gamin, de finir par: « ça n’est pas possible parce qu’on a pas d’argent ».
Encore une journée, où il faudra culpabiliser d’être pauvre. Culpabiliser de ne pas avoir les diplômes qui vont bien. Culpabiliser de ne pas avoir pratiqué de soins génitaux buccaux aux personnes a des couettes.
Culpabiliser d’être juste quelqu’un de simple qui n’envisage pas de détruire son voisin pour gravir un échelon qui ne rapporte finalement que 50 balles mais la satisfaction d’être au dessus.
Culpabiliser de n’être qu’un salaud de pollueur à emmener ses gamins connaitre autre chose que les murs gris des chambres sans espoir.
Culpabiliser de ne pas aller dans les grands restaurants pour sauver l’économie nationale.
Culpabiliser de ne pas parcourir le monde en jet privé à la découverte de la misère de l’autre bout du monde parce que celle en bas de chez soi est trop dégueulasse, qu’elle est antisémite, fasciste, raciste, genrée, homophobe, xénophobe, grossophobe, microbe.
Culpabiliser simplement de n’être que soi et d’avoir échoué volontairement ou pas à être un autre.