La paella est-elle la même sans les moules?

Actuellement se déroule en Espagne, c’est à dire dans un pays limitrophe et non à l’autre bout du monde puisqu’il parait que la proximité entretient l’intérêt, des événements d’une portée politique et symbolique extrêmement importante. Encore une fois, ces événements sont assez peu relayés par les médias français ou en tout cas sans aucune profondeur dans l’analyse. En gros, ce qu’ils nous disent c’est que la Catalogne veut se séparer de l’entité espagnole et acquérir une autonomie.

Le parlement de la Catalogne (alors déjà ils ont un parlement régionale, vous me suivez?) a décidé, par la voix de son président, Carles Puigdemont, d’organiser un référendum sur l’auto détermination de la région, aujourd’hui (alors dimanche puisque je suis à la bourre dans les parutions). Le gouvernement central de Madrid a interdit cette manifestation, ( ou élection) et l’a même faite interdire par voix de justice. Le point de départ de cette revendication vient de 2006, année durant laquelle le gouvernement espagnol offre à la catalogne un statut particulier. Et je dis bien nation parce que c’est ainsi que le parlement national reconnait, à ce moment là, la Catalogne. En 2010, la cour constitutionnelle, son équivalent espagnole, revient sur cette décision et annule plusieurs articles jugés anticonstitutionnels, ce qui ravive les velléités indépendantistes des plus motivés. Et ce qui est assez logique. Règles basiques du management, en supprimant un droit que tu avais accordé préalablement, tu crées des rancœurs qui n’auraient pas existé, si tu avais fermé ta gueule quand il le fallait. En novembre 2014, le parlement de Catalogne organise donc une consultation populaire sur la question de l’autonomie. Le vote offre 80% des suffrages exprimés en faveur de cette indépendance. (Là j’avoue, je ne sais pas si c’était l’indépendance ou l’autonomie). Cette consultation n’a cependant aucune valeur juridique selon le pouvoir central puisque seuls 33% des inscrits se sont exprimés. Toutefois, il est visible qu’une partie de la Catalogne, et une partie non négligeable, se prononce en faveur de l’indépendance. En 2015, l’ensemble des partis indépendantistes obtenait 45% des voix. Il y a donc manifestement un public, une frange, un nombre, pour cette indépendance.

Le préambule étant posé, il s’oppose deux visions et interprétations de cet événement. Sans doute d’autres, mais les premières qui se dégagent sont ces deux là.

La première idée est que l’Europe se construit autour d’un régionalisme qui risque d’être de plus en plus exacerbé puisque la volonté européenne (et par Europe, ici, j’entends bien la commission européenne et non le continent géographique), est de construire une Europe des régions. L’UE cherche à lutter contre l’état nation, c’est à dire à réduire les contraintes de frontières ou de souveraineté nationales, et purement nationales, en privilégiant une union plus large et libérée des contraintes. (Evidemment entre autre chose, mais vous connaissez le truc).  Lorsque l’on est anti-Europe, forcément, cette perspective pose problème. La multiplicité des états nations affaiblit les velléités souveraines. L’éventuelle indépendance de la Catalogne offrirait un sas de possibilités pour les régions aux volontés indépendantistes. (Bretagne, scission de la Belgique, de l’Italie, pays basque, pays de Galles…) Il y aurait donc la création de cette Europe des régions si chère à Juncker. De petits états, nouvellement crées, seraient, sans doute, plus facilement solubles ou compatibles dans une entité plus large. Un pays s’appuyant sur une histoire, une culture ancestrale peut facilement marquer des réticences.

L’autre regard, c’est la légitimation de l’état espagnol et le refus de reconnaître l’ultimatum catalan. Madrid aurait raison de refuser ce référendum et, même si les violences sont condamnables, elles s’expliquent. Ce référendum était illégal. Toutefois et sans prise de position partisane, la police espagnole qui fait tout pour empêcher les gens de voter a donné un spectacle lamentable de l’autorité centrale espagnole. Traiter son propre peuple de cette façon ne peut qu’accentuer le sentiment nationaliste ou au moins l’opposition à un pouvoir central. Apparemment, la volonté de conserver un état espagnol fort et uni est une priorité pour certains. Les anti européens considèrent que Madrid ne doit pas lâcher pour conserver l’unité du pays. Pourquoi? pour continuer à appliquer la politique de Bruxelles. En effet, les anti Europe expliquent que l’indépendance de la catalogne serait une catastrophe économique pour cette région et qu’ils voudraient intégrer l’Europe alors que le reste de l’Espagne s’y opposerait et donc condamnerait économiquement la Catalogne.

Au final, la catalogne ne doit pas être indépendante parce que sinon l’Espagne serait divisée et les régions supplanteraient les états et l’Europe des régions, c’est à dire fédérale, serait en marche avec un contrôle centralisé depuis Bruxelles. Donc c’est nul. Mais que les catalans construisent un référendum pour s’autodéterminer, c’est pas bien non plus parce que sinon l’état espagnol ne serait plus uni ni central et serait sous le contrôle de Bruxelles.

En conclusion, la Catalogne est indépendante c’est nul parce que c’est l’Europe des régions contrôlée par Bruxelles. La catalogne n’est pas indépendante c’est nul parce que le pouvoir central continue à suivre la politique d’austérité de Bruxelles et d’être sous le joug de l’Europe version union européenne. J’adore.

 

SOURCES:

http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/10/02/referendum-en-catalogne-la-presse-espagnole-dechiree-et-la-presse-internationale-inquiete_5194987_3214.html

http://www.lemonde.fr/international/article/2017/09/29/catalogne-a-j-2-avant-le-referendum-sur-l-independance-comprendre-les-enjeux-du-scrutin_5193225_3210.html

 

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