Une pluie de matraques sur le soleil du changement
Pourtant, malgré un contrôle de tous les instants par tous les moyens possibles, qu’ils soient humains ou technologiques, qui permettent de construire une société de l’uniformisation, certains refusent encore de se cadrer. La méthode douce a été distillée de partout et pourtant, il existe encore des réfractaires. Encore des gens pour contester l’ordre, pour refuser une hiérarchie qui n’a aucune légitimité si ce n’est celle d’un vote mais un vote auquel plus personne ne participa à l’exception de quelques illuminés et d’une majorité de désabusés qui remplissent leur devoir électoral comme d’autres remplissent leur devoir conjugal au bout de tant d’années d’un mariage qui n’est plus qu’une habitude et une routine douloureuse.
Pourtant, il faut que ces derniers réfractaires contestataires soient mis au pas. Ils sont réduits au silence mais ils continuent à construire des systèmes alternatifs pour se faire entendre, pour se faire voir. Alors, il faut passer la vitesse supérieure. Le contrôle ne suffit pas, la norme, la règle construite depuis tant d’années par tant de petites pierres posées les unes sur les autres doit s’imprimer, se naturaliser. Et pourtant, encore, malgré ce naturel artificiel, le naturel revient au galop.
Il ne reste plus que la force. Faire entrer de force dans des cerveaux malades, une ligne de conduite commune qui se doit d’être courbée. Des cordons de soldats sont lâchés face aux réfractaires mais aussi au sein même des réfractaires. Il y aura luttes entre les forces de l’ordre, et ce nom est évidemment loin d’être un hasard, il faut de l’ordre, que les choses soient rangées dans le sens décidé. Et dans un système sans ordre, il est aisé d’introduire les germes qui feront les mauvaises herbes. Au sein même des mouvements, s’infiltreront les ombres masquées qui provoqueront les conflits et donneront le grain nécessaire pour faire des réfractaires les hors la loi. Ils provoqueront les conflits, briseront les symboles de l’ordre, piétineront les routes du bien pour que ce qui reste de réfractaires soient rangés dans la case dissidente. Des fachos, des dangereux, des méchants, des casseurs. Les gardiens de la paix, ça non plus, ça n’est pas un hasard, taperont et seront légitimes pour taper. Oh ils ne taperont pas les débiles sombres infiltrés qui ne savent même pas pourquoi ils sont là, si ce n’est croire qu’ils combattent une idéologie qu’ils ne font que nourrir, bien sûr que non, ils taperont sur ceux qui réclament simplement que quelques miettes tombent du buffet. Il faut rétablir l’ordre, coûte que coûte.
La chape de plomb première se voulait gentille. Surveillance appuyée mais pacifique, contrôle de ce qui circule comme informations et divertissements pour baisser le besoin et le sentiment de révolte, ostracisation de la dissidence par des dogmes religieux ou psychologiques. Puis, l’étape suivante sera la violence, d’abord physique puis morale et psychologique.