Étant entendu que je suis dans une purge pré estivale qui vise à mettre au clair certains éléments de ma vie, afin de tenter, désespérément, d’y voir plus clair dans ma vie personnelle, à moi, que j’ai, je voudrais juste signaler aux redresseurs de tort que je m’en fous. Et je m’en explique.
En ce moment, fleurissent, un peu partout chez beaucoup de personnes, des statuts ou des commentaires visant à montrer que l’amour que d’autres pourraient porter sur les résultats de la coupe du monde russe était la preuve retentissante de l’inaction et de l’incapacité intellectuelle à comprendre les enjeux de ce monde.
C’est une forme de mépris que je trouve, personnellement, tout à fait méprisable. Ces gens qui critiquent les amoureux du ballon rond, ou seulement les intéressés ou même les non déconnectés de ce monde, se permettent des jugements de valeur qu’ils critiquent eux-mêmes en permanence.
Bien sûr, si l’on est intéressé par les résultats de son équipe nationale, on est dans l’incapacité totale et absolue de se tenir au courant des mouvements de Jupiteux (main sur le cœur toussa toussa), incapables de se révolter ou de s’indigner. Quelle simplicité argumentative et intellectuelle.
Chacun est en droit d’apprécier ou non le foot. Ceci est une évidence. Et ce n’est même pas discutable. Mais considérer que parce qu’on est attiré par ce sport, on est forcément intellectuellement limité, je me demande qui a cette limite finalement.
Ces personnes critiques appellent de leurs vœux et de leurs publications à un sursaut national du peuple face aux problématiques nationales ou du monde. C’est une cause noble et je la soutiens. Toutefois, lorsque justement ce sentiment national s’exprime, ces mêmes personnes viennent critiquer. Il arrive un temps où la cohérence peut servir certaines causes. Aimer les résultats de son équipe nationale et le sport le plus populaire du monde ne fait pas de nous des handicapés revendicatifs et, de la même façon, ne pas s’intéresser au foot ne fait pas de ces personnes de mauvais patriotes.
Il est tout à fait possible et, peut-être même pertinent finalement, de s’intéresser à la coupe du monde et, en même temps!, à la suppression de postes de fonctionnaires ou à la baisse des budgets des chambres de commerce. Il est tout à fait possible de ne pas s’intéresser au sport et pourtant de montrer un attachement aux couleurs. Parce que, malgré tout, voir les Champs Elysées couverts de drapeaux français, cela aura toujours un sens et une valeur.
De la même façon, s’indigner de l’intérêt du peuple pour le ballon rond parce que celui-ci supposerait qu’on néglige les luttes quotidiennes, bien caché derrière un écran et où, la seule expression d’une révolte ressemble davantage à la libération sexuelle et des drogues des années 70 avec l’absence de douches et la ménagerie qui court derrière me semble particulièrement dépassée et inutile.
On en revient alors toujours aux mêmes atavismes, aux mêmes problématiques. Les suiveurs du ballon rond sont incapables d’indignation parce que ceux qui n’aiment pas le ballon rond considèrent avec condescendance que cet attachement à la balle qui tourne ne peut être conjoint à une prise de conscience des préoccupations sociétales. Il est impossible pour l’être humain, apparemment, d’avoir plusieurs pôles d’attraction. Il est impossible, apparemment, de se sentir concerné par son équipe nationale et par les crises multiples actuelles. Pitoyable.
Ces critiques viennent de personnes qui, généralement, elles-mêmes, n’ont pas particulièrement fait avancer les causes qu’elles prétendent dénoncer ou combattre ou mener. Mais il est évident pourtant que dans les combats futurs, il y a de fortes chances que chacun d’entre nous se retrouve assis à côté d’une personne qui aura vibré au franchissement de la ligne de but par un ballon frappé par un compatriote. Ce jour là marquera un peu la stupidité du raisonnement qui veut que le foot est uniquement réservé aux beaufs déconnectés et marquera surtout la complexité qu’il y aura à fonder un monde meilleur.
Les critiques viennent de gens qui invectivent les intéressés du ballon rond parce qu’ils seraient alors inertes dans les combats. Ces gens qui veulent construire une société, tous ensemble, mais qui, avant même de commencer, stigmatisent une partie de la population. Cela démontre une démarche cognitive tout à fait admirable selon moi. Changer le monde avec des gens qu’on méprise. La demi finale, hier, a réuni plus de 18 millions de téléspectateurs, soit davantage que d’électeurs de l’autre là, au second tour des présidentielles, mais, du haut d’une suffisance qui sort dont ne sait où, les critiques se permettent de mépriser ou pire ces personnes. L’union va être belle du coup.
Alors vous n’aimez pas le foot, très bien. Vous aimez le foot, très bien. Si un jour, le peuple se décide à se bouger, il y aura de tout. Pour l’instant, nous sommes tous dans la même galère et le simple fait de mépriser l’autre ne permettra jamais une lutte commune.