j’ai fait avec les moyens du bord de la falaise… 6… 19

« Je commençais à me dire que je m’étais faite un maximum d’illusions. Qu’en réalité, j’avais été déflorée, par un bellâtre, à l’accent chantant, dans les chiottes glauques d’une galerie d’art contemporain, pendant un vernissage, dont j’étais incapable de me souvenir la moindre oeuvre exposée. J’avais attendu anxieusement un jour, puis deux et puis, petit à petit, je m’étais faite cette idée que, comme bon nombre de gonzesses sur cette planète, je m’étais faite baiser par un mec qui n’avait eu, pour seule envie, que de se vider les couilles. »

Cette dernière phrase, prononcée avec mépris, me sortit de ma torpeur. Preuve, si besoin était, que la vulgarité, dans la bouche d’une femme, me posait, même inconsciemment, problème. Elle ressentit ma désapprobation et elle savait déjà que j’avais du mal avec ce travers chez elle. pour moi, c’était un travers. Elle prétendait que c’était la modernité, la norme du 21 ème siècle et que j’étais trop vieux, trop conservateur et limite réac pour comprendre les changements sociétaux. désormais les femmes avaient le droit et même le devoir de se comporter comme des hommes. J’avais beau lui dire qu’un tel comportement me dérangeait aussi chez un homme, et que je trouvais ça dommage de vouloir se comporter comme une catégorie de personnes qu’on passe son temps à dénigrer, rien n’y faisait. J’étais entré dans la sphère du vieux con comme d’autres entrent dans la friendzone. Quelque part, le fait de devenir un objet asexué à ses yeux m’allait assez bien. J’avais toujours l’appréhension du jeu de séduction dès lors que j’étais en contact avec une femme. Le besoin réciproque de séduire, l’obligation faite de copuler, pour marquer le coup, avant la prise de conscience de l’erreur. Savoir qu’elle ne me considérait pas comme une possibilité de satisfaire sa libido me plaisait assez. Déjà parce que je n’en avais pas envie mais la chair est faible et surtout, parce que j’avais besoin d’elle sur cette histoire. Et que nécessité fait loi.

 

Laisser un commentaire