A quel moment, c’est parti en couilles?
Il parait évident qu’on nous prend délibérément pour des connards… mais tout glisse, tout passe et ça recommence. La moindre norme devient pathologie et devient nécessairement cause à soigner. Alors il faut soigner, couper les branches pourries de notre pseudo humanité. Ce monde ne me ressemble pas, ne me ressemble plus même s’il n’a jamais véritablement eu vocation à me ressembler, non plus. Comment se sentir à l’aise dans un endroit où l’on se sent étranger à soi-même? Je m’efforce de ne pas avoir d’avis sur tout et j’en fais même une ligne de conduite. La plupart des sujets centraux de mes concitoyens ne sont que des connaissances assez vagues pour moi parce que, vraiment, je m’en fous. Ce n’est pas tant un rejet de la société mais plutôt, simplement, que depuis des années, je n’aime pas les gens. Ils me fatiguent très vite, trop vite. Je m’autorise donc à ne pas avoir d’avis et devant l’insistance parfois de certains, je m’évertue à avoir l’avis contraire de la bien pensance alors qu’en réalité, je m’en fous, mais je joue ma vie à défendre cette opinion dont je me fous, dans le seul but de ne pas être celui qui a le même avis que celui qui aurait un avis qui serait l’avis que les autres veulent que j’ai en ayant l’avis commun que je n’ai pas parce que je m’en fous.
Toutefois, soit je me tais parce que je suis gagné par une trop grande lassitude, soit je suis contre, par principe. Et défendre parfois l’indéfendable est une source de joie intellectuelle sans commune mesure, c’est de la pure mauvaise foi souvent mais qu’est ce que c’est bon… En gros, l’essentiel de ma conduite tourne autour de la notion d’être le moins emmerdé possible par des gens ou des sujets qui n’existent que très peu pour moi. Ils se trouvent que les gens existent davantage que les sujets puisqu’ils empiètent bien trop souvent sur ma propre liberté. De toute façon , s’il faut parler des gens d’aujourd’hui qui considèrent que tout est pourri, que la drague est une insulte, que l’art contemporain c’est beau, que les nains, c’est pas bien d’en rire et que de toute façon, rire c’est pas bien, que Dieu est grand et que nous sommes petits, je cherche désespérément l’intérêt. Tous les rapports humains me paraissent tellement contrôlés, épiés, jugés qu’il me semble que le mutisme et la misanthropie sont les seules alternatives. S’exprimer de manière anonyme, ne s’entourer que des rares personnes avec qui parler reste un plaisir, parce que même le désaccord ne t’enverra pas en tôle, et à la limite basta… Parce que les gens….
Tout part ainsi à vau l’eau parce que le monde lui-même ne semble plus trop bien savoir comment penser. Il faut avoir un avis sur tout et le donner mais surtout que cet avis soit conforme avec la lente marche vers les enfers que nous construisons chaque jour mais avoir un avis est indispensable. Nous sommes tous des porcs nous les hommes. Nous sommes tous de méchants racistes nous les blancs. Les femmes sont toutes des victimes et il faut que ça cesse. Les » non souchiens » sont tous des victimes. Aucune mesure, aucun contrôle.
– C’est un film français donc c’est de l’art…
– Je croyais que c’était juste de la merde pardon…
– C’est de l’art contemporain, tu ne peux pas comprendre…
– Bah oui, ça doit être ça…
– C’est de la pensée complexe, tu n’as pas le niveau
– Ah oui, c’est ça, je me disais bien qu’il me manquait un truc… Mais je paie quand même?
– Ah bah tout travail mérite salaire!!!!
– ahhhhh c’est un travail!!!!! ah oui, merde, j’avais pas vu ça comme ça…