Et parfois, nous ne pouvons être que nous autre chose que nous mêmes. En tout cas, je ne peux être que moi même si l’idée d’être un autre peut être plaisante. Il y a toujours ce moment où se mentir ne peut plus être une alternative. Ce moment où la vérité de ce que l’on est, au plus profond de soi, rejaillit avec force par tous les pores de la peu. Ce moment où il faut s’avouer ne pas être si bien qu’on le voudrait, qu’on l’espérait. Entendre et comprendre enfin que je ne suis rien d’autre qu’un petit bonhomme qui essaie de se débattre avec lui-même et qui échoue et qui continue d’échouer mais qui continue de se débattre. Il n’y a pas à se haïr ou à se mépriser. Tout est dans la même logique mortifère, autodestructrice, la mienne, mais programmée ou pour le moins prévisible, sans surprise. A force d’être jugé, méprisé, rabaissé, critiqué, il ne peut y avoir d’autres issues. Il ne reste plus qu’à subir les cris des bébés qui cuisent sous le soleil de plomb sérénissime, les élans émotifs autour d’un pont qui s’effondre entraînant un pays entier dans l’incompréhension triste. Ma propre histoire n’a que peu d’importance en réalité. il y a les messes dans tous les lieux possibles, les prières entre deux portes et les bruits lointains de voix étranglées et nerveuses à raconter encore et toujours l’indicible sans jamais oublier de pleurer ces disparus et puis, le respect qui lui aussi décède de sa belle mort en laissant dans la mémoire commune ce qu’est la voix de la soul et le vibrato de l’âme. Alors, au beau milieu de ces nuits pleines de la tristesse universelle, les méandres de mes propres souffrances n’ont que l’écho limité d’un réseau téléphonique capricieux au milieu des allées sombres d’un ailleurs improbable et imprévu. Les larmes qui ne coulent plus à force d’être trop sèches sur des joues trop burinées par le soleil transalpin ne racontent qu’un malheur banal d’une vie futile et solitaire au milieu d’une foule innombrable, sauvage, austère. Même si cela apparaît malsain, déséquilibré, violent, c’est la solitude, la confrontation seul avec soi qui fait que la tête se redresse peu à peu parce que l’oubli que l’autre te renvoie devient une présence continuelle, permanente, ancrée. C’est parce que tu pars que l’autre t’oublie et c’est parce que l’autre t’oublie que finalement tu ne pars comme tu le devrais. C’est parce que le choix n’est plus, que tu deviens ce que tu te devais d’être, celui que tu n’aimes pas mais qui est le véritable moi.