De l’Education Nationale ou de ce qu’il en reste…. Acte III, Scène 1

Encore une fois je ne vais pas me faire que des amis mais au diable les varices… faire ce que j’ai été déterminé à faire sans réflexion plus poussée que simplement celle que l’on m’ordonne de construire, de tenir, toute cette stratégie semble plutôt être le moyen le plus simple, le plus rapide pour arriver vers ce à quoi ils nous ont destinés et mon esprit de contradiction m’oblige à repousser cette alternative ou tout du moins à la regarder dans les yeux et à convenir avec moi-même qu’elle ne me convient pas. L’éducation, sous sa forme scolaire, vise à offrir au plus grand nombre des capacités d’analyse et de sens critique. Bon… il est dommage de constater chaque jour que c’est un échec lamentable et cuisant. L’école devient un peu plus chaque jour une garderie à grande échelle qui maintient les élèves qui y passent dans un niveau médian d’analyse totalement conformiste et absolument pas subversif. Le but de l’éducation nationale est clairement de maintenir un niveau de dépendance constant pour tous.

Tout commence avec le recrutement et la mise en place des enseignants. L’état a mis en place la nécessité d’un diplôme à Bac +5 pour accéder à la possibilité d’enseigner et ce, à quelque niveau que ce soit. De la maîtresse de maternelle à l’enseignant de philosophie en prépa, il y a obligation d’avoir au minimum un bac +5 désormais. Ce Master 2 peut s’obtenir dans n’importe quelle discipline, toutefois, en contrepartie de cette nouvelle exigence, a été créée une nouvelle filière : Sciences de l’éducation. On peut donc, et même l’on doit donc, avoir, pour enseigner les premiers principes de lecture comme les fonctions mathématiques les plus complexes, un diplôme qui n’est absolument pas monnayable sur le marché actuel du travail. L’enseignant doit avoir un bac +5 de prof. Dès le départ, la reconversion, si jamais celle-ci doit avoir lieu un jour, est quasiment impossible. Vous avez un diplôme de lecture et de déchiffrage de théories pédagogiques pour grossir le trait, théories qui, en plus, souvent, pour la plupart, s’avèrent totalement inutiles ou inadaptées in situ. Le lobby des pédagogos a été tellement performant qu’il a réussi à faire croire à des politiciens incompétents qu’il était essentiel de connaitre l’ensemble des théories impraticables en classe pour pouvoir enseigner. Il est impératif de connaître toutes les possibilités de l’évaluation ou du programme pour gérer une classe. Que l’essentiel du métier d’enseignant se trouve dans la faculté à construire des grilles d’évaluation, des utilisations des compétences ou dans la présentation des séquences et la construction des séances. En gros, êtes-vous bien formatés pour être un bon formateur ?

Vous voilà donc détenteur d’un diplôme de M2, totalement inutile et inadapté. Vous avez obligation de ne pas vous être trompé de chemin de vie. La bascule est assez compliquée à mettre en place. Toutefois, ce diplôme n’est pas suffisant. Loin de là. On exige ensuite de vous que vous obteniez un concours. Il ne s’agit pas du BCG ou du permis de conduire mais d’un concours plutôt pointu (que ce soit pour les profs des écoles ou ceux du secondaire), dans lequel on va vérifier que vous avez bien compris toutes les méthodes pédagogiques que vous avez apprises et que vous êtes capable de proposer des activités variées et pertinentes pour les élèves qui se trouveraient devant vous. En gros, on cherche dès ce concours à savoir si, sur le papier, vous serez un bon petit soldat. Ce concours nécessite du travail de révision, de lecture, de connaissances. On ne s’improvise pas lauréat du CAPES ou du CRPE . On se retrouve confronté à des épreuves théoriques sur table dans de grandes salles des expositions et on joue, à ce moment-là, une partie de son avenir professionnel. Si jamais, grande joie, les écrits sont réussis, au moins suffisamment pour que l’on considère que vous êtes à peu près en accord avec les inepties de l’éducation nationale, vous avez le droit de passer les oraux. Epreuve ou, encore une fois, vous devez montrer votre capacité à accepter un système particulier mais extrêmement cadré. Vous êtes jugé, par des gens que vous ne connaissez pas mais qui vous sont présentés comme références dans le domaine or il se trouve que dès lors que vous connaissez l’identité de certains d’entre eux, vous voyez qu’en terme de références ils n’ont que celles de la cooptation et de la servilité pour nombre d’entre eux.

Considérons que vous avez votre M2, c’est-à-dire 5 années d’étude quasi inutiles, dans un domaine quasi inutile et non utilisable dans un autre parcours professionnel, que vous avez réussi une épreuve écrite particulièrement exigeante et un oral particulièrement stressant, vous êtes détenteur du Capes ou du Crpe. Mais vous n’êtes pas encore prof.

L’obtention du sésame d’enseignant est donc assujettie à la faculté de se fondre dans un moule qui très souvent n’est que totalement artificiel et ne vise qu’à maintenir les enseignants dans un statut de bons petits soldats. Il est d’ailleurs aisé de constater que ceux qui ont des problèmes avec une hiérarchie pédagogique poussiéreuse sont généralement ceux qui sortent du rang, qui ne marchent pas dans les passages piétons ou qui ne font pas les courbettes réglementaires. Dès qu’un enseignant ne fonctionne pas comme le veut la hiérarchie, il prend le risque de se voir critiqué si ce n’est davantage. A contrario, et nous en avons tous connus, des enseignants qui se font bordéliser, qui sont inintéressants, inadaptés mais qui respectent bien toutes les cases sont valorisés. J’en ai connu des bi-admissibles et des agrégés dans les cours desquels les stagiaires et autres contractuels venaient faire la police tellement la gestion de classe était impossible, mais voilà, maitrise totale de la discipline au niveau théorique. Sur papier, c’est parfait, dans la réalité c’est à chier. Lorsque les formateurs, la grande majorité, sont dans le sens du vent, il ne faut pas attendre que les formés aillent à contre-courant ni même que l’anti conformisme soit compris ou valorisé. Si ceux qui doivent nous mener à exploiter nos différences sont ceux qui représentent en toutes choses le système, il ne peut y avoir d’autre issue qu’une uniformisation. Je veux bien que, par certains truchements cognitifs, certains essaient de me démontrer le contraire afin de protéger une paroisse en ruine mais le triste constat de la réalité est bien celui de faire entrer par tous les moyens tout ce qui dépasse, et lorsque ce qui dépasse est un humain alors les dégâts sont profonds. Bien évidemment, les « cas particuliers » ne peuvent être pris comme mètre étalon d’une masse et d’une majorité, c’est une évidence, toutefois, en l’occurrence, cette corporation des cas particuliers est juste niée et on lui demande à elle, cette corporation, de faire des efforts pour entrer dans un moule débile, stérile et abscons. Certains se sacrifient et réussissent à devenir de bons petits soldats à la solde d’une idéologie à laquelle ils ne croient pas, d’autres ne réussissent pas à s’adapter et les portes de l’uniformité se referment sans cesse sur eux.

Une réflexion sur « De l’Education Nationale ou de ce qu’il en reste…. Acte III, Scène 1 »

  1. C’est bien résumé !! Et je vois, déjà par rapport à moi-même, que ce lavage du cerveau laisse des traces: j’ai beau avoir conscience de toutes ces inepties, je me surprends de devoir lutter contre ce formatage ( qui n’a de formation que le nom…) de fait, je dois lutter consciemment, chaque jour, pour ne pas devenir un formaté…

Laisser un commentaire