Si les jours doivent se construire autour de cette routine et de cet ennui alors autant en prendre son parti et cesser de rêver afin de passer à autre chose parce qu’il est temps. Si les nuits doivent devenir l’exutoire et le réceptacle de toutes les frustrations passées et à venir, alors autant faire en sorte qu’elles se remplissent vite et qu’elles en dégueulent de ne plus pouvoir absorber les océans de larmes et de foutre versés sans but ni raisons ni objectifs.
Si les jours doivent devenir les moments de souffrance, de torture de chacun afin que la terre reçoive son quota d’enfer et laisse enfin respirer les oraisons de nos chemins, alors ainsi soit-il… Si les nuits doivent rester ce mystère qui fait que rien n’est jamais pareil, que tout se transforme au gré des pas et de leurs échos sur les pavés humides et saillants des chemins de traverse de la mémoire, alors que le moment vienne.
Si les jours doivent rester cet interlude factuel des immersions dans la vie collective, dans le réseau social, dans le silence abyssal et le fracas permanent, alors que viennent les symphonies et les oraisons. Si les nuits doivent faire des rêves, des réalités imaginaires, des symptômes de richesses, des pertes d’envie d’avoir été trop usés par l’usage et la fréquence, c’est que la fin est proche et arrive pendant qu’il est trop tard.
Si les jours doivent faire des mondes entiers, offerts aux délires et aux fantasmes, sans buts avérés, ni reconnus, pour chaque âme perdue au milieu de l’infini océan du vide de l’existence que le grand horloger construit chaque jour, et que les nuits doivent lutter encore et toujours pour maintenir ce semblant d’espoir qui fait que, encore, malgré tout, tout est possible, et plus encore, et qu’il suffit que le départ soit donné pour que la fin approche.
Si les jours doivent raconter encore cette histoire lancinante d’un lendemain qui chante et qui sera beau, alors qu’hier encore, il ne restait rien d’autre que des souvenirs, des trahisons, des larmes, du sang et un espoir déçu et déchu, alors qu’ils parlent encore puisqu’ils y croient encore. Si les nuits doivent réparer en cadence, en permanence, les dégâts des jours, les massacres des aurores, les catastrophes des aubes, les cataclysmes des crépuscules, alors ainsi soit-il. Le reste est éclipse.