Par la magie des réseaux sociaux et de l’impossibilité à rester camouflé, dans ce monde, où tout se partage, même le vide, mon récit sur mon rapport avec l’éducation nationale s’est retrouvé publié sur un groupe d’enseignants. Dans un premier temps, je vais rappeler cette lapalissade qui me semble essentielle, surtout en ces temps particuliers: je suis responsable de ce que je dis, pas de ce que tu comprends.
A travers mon billet précédent, plusieurs reproches ou critiques m’ont été faits. Et j’en suis particulièrement satisfait. D’abord, parce que cela signifie que certains prennent le temps de lire ce que j’écris et donc, je les en remercie, et, d’autre part, parce que les critiques se doivent d’être constructives et elles ne peuvent me permettre que de m’améliorer, et évidemment, j’apprécie cette opportunité.
Les points qui semblent déplaire à certains, concernent principalement le traitement que j’aurais réservé aux titulaires. J’aurais volontairement, et de manière prononcée, attaqué les enseignants. Je rappelle qu’il s’agit de mon expérience personnelle, de mon histoire, alors, d’abord, je dis quand même ce que je veux… Il parait que nous sommes en démocratie (voir les billets précédents) et, ensuite, j’ai volontairement, justement, été particulièrement tendre avec les anciens collègues, contrairement à ce que j’ai vécu. Il s’agit de mon histoire, des profs que j’ai croisés, il ne s’agit pas de tous les enseignants de France, mais de ceux qui officient dans les établissements que j’ai fréquentés et bien évidemment, pas de tous. On m’accuse de généraliser alors je précise qu’il s’agit d’une poignée d’enseignants qui se pensent supérieurs aux suppléants, qui se cachent de toutes activités extra scolaires, qui surveillent le moindre de tes faits et gestes et rarement pour que tu t’améliores mais bien, le plus souvent, pour te dénoncer, le plus vite possible, à la direction. Si les enseignants titulaires se sont sentis visés par mes mots alors, en réalité, tant mieux… Peut être que cela permettra de jeter un autre regard sur les suppléants, stagiaires, contractuels… Je ne généralise pas et je parle clairement et définitivement des enseignants que j’ai rencontrés… Je ne vois pas comment le dire autrement… Dans le secondaire, dans mon département… Point… La majorité des enseignants, en France, je l’espère, en tout cas, adopte les valeurs qu’ils sont censés défendre et promouvoir.
Le fait d’être suppléant, contractuel, implique, de fait, que j’aurais eu besoin d’aides, de soutiens, de conseils or, il se trouve que je n’ai vécu que des coups fourrés, des attaques et, rarement sur la qualité de mon enseignement, mais bien sur ma personne, et c’est ce qui m’est reproché sur les rapports d’inspection. On ne me reproche rien au niveau didactique même si j’ai, évidemment, totalement, conscience que tout n’est pas parfait et même très loin de ça, mais on me reproche ma personne, ce que je suis. On me reproche sous couvert de cette histoire de bienveillance sur laquelle il faudra un jour que le corps éducatif pose une vraie définition, d’être trop proche des élèves. Je vous vois venir. Etre trop proche, dans le sens où je savais ce qu’ils vivaient, où je les chambrais et qu’ils avaient autorisation de me chambrer en retour, c’est ça l’égalité, mais évidemment, sans aucune insulte, ni d’un côté ni de l’autre. Les limites étaient claires pour tous mais la décontraction était de mise parce que ça n’est pas grave.
J’ai entendu ou plutôt lu aussi qu’il s’agissait d’un texte qui montrait un Moi face au reste du monde. Je vais considérer que je me suis mal exprimé plutôt que de considérer qu’il s’agit d’un commentaire de prof (je reviendrais sur cette notion qui m’inspire le titre de ce billet). Je ne suis, en rien, seul contre le reste du monde. Le monde est injuste au secours, sauvez moi! Premièrement parce que la très grande majorité des contractuels que j’ai croisés, dans mon parcours, vivaient exactement la même chose que moi (donc je ne suis pas seul) et que considérer que je me suis placé, seul, face au reste du monde, ça, c’est de la généralisation stupide que je n’ai pas faite. Il s’agit juste de moi face à quelques personnes. J’ai d’ailleurs clairement stipulé qu’il y avait les collègues, certes, et je réitère cette critique, mais aussi les directions, les inspecteurs et les formateurs ESPE. Comme je l’ai appris de ma banlieue, la personne qui se sent visée ne peut l’être que parce qu’elle n’a pas, elle même, le cul propre. Cela est certes familier mais reprend et annonce l’idée qui était sous jascente jusqu’alors, et qui devient visible, d’un corporatisme d’opportunisme. On a le droit de ne pas croire en mon témoignage, et à la limite, cela n’est même pas mon souci, je raconte et la foi est une donnée propre à chacun. On me croit, tant mieux, on ne me croit pas, tant mieux… Et, encore une fois, je ne généralise pas! Je parle de mon expérience.
Le statut de contractuel n’est pas un choix, en tout cas pas, pour moi, et si cela avait été un choix, je n’aurais pas passé le concours. Je ne sais pas s’il s’agit d’un choix de toucher 1300 euros par mois avec un bac + 5 pour faire le même job qu’un titulaire, (on peut, peut être, se retrouver autour de cette idée qu’un titulaire et un suppléant exerce le même métier? En fait, je me demande quand je lis les témoignages des titulaires.). Il y a donc des titulaires qui vous considèrent comme équivalents à eux et d’autres, comme je le vois dans les témoignages, qui se considèrent supérieurs. Ils ont raison.
J’étais un mauvais prof, je l’ai dit mais je le redis puisque certains m’ont reproché d’être imbu de moi même. Je ne pensais vraiment pas qu’on me reprocherait cela à travers ces textes mais soit… je suis imbu de moi même mais j’étais, quand même, un mauvais prof. Alors, on peut me faire le reproche de la prétention même si je le trouve assez paradoxal avec les 3 textes qui composent finalement cette confession. Mais j’accepte le reproche et présente mes excuses sur le fait que je ne me considère pas encore totalement comme une sous merde.
On me reproche de taper beaucoup, sans doute trop, sur cette fabuleuse institution. Alors, je ne raconte que ce que j’ai vécu…. MOI, MOI, MOI (ça c’est de la suffisance mais si je ne fais pas ça, on va dire que je généralise, alors c’est MON histoire, est-ce clair? )
- Oui, un contractuel touche 1300 euros environ selon les heures sup et compléments divers type PP.
- Oui, on nous demande un bac + 5 pour exercer, ce qui correspond, dans le monde hors EN, à un statut de cadre. C’est la loi qui est comme ça et non, moi ni ma prétention.
- Oui, j’ai exercé ce métier pendant 6 ans dans un établissement qui se trouve à une heure de route de chez moi (et je suis très loin d’être le seul enseignant dans ce cas, mais j’imagine que ceux qui me critiquent trouvent cela normal aussi.)
- Oui, pour aller au travail, il faut un véhicule et oui un véhicule a besoin d’essence pour rouler (quel con! et ça aussi j’en parlerais un jour) et donc, oui, une partie du salaire part en fumée de pot d’échappement.
- J’ai même, à un moment, loué une chambre chez l’habitant, une collègue, pour éviter la route parce que, physiquement les routes de campagne, la nuit, je n’y arrivais plus, je ne suis plus tout jeune non plus, et, à mon âge, les facultés déclinent très rapidement. Donc 2 loyers. Pourquoi 2? parce que j’ai aussi une vie, aussi étrange que cela puisse paraître, et que j’avais, quand même, envie, parfois, de croiser mon fils, pardon.)
- Je parle uniquement que de ce que je connais donc je ne parle pas d’autres parcours parce que je ne suis pas le mieux placé pour en parler même si, évidemment, j’en connais, parce que, en tant que suppléant, j’ai été amené à parler avec les suppléants puisqu’on forme assez vite une caste, un entre soi (dans mon département et dans les établissements que j’ai fréquentés!)
- Je suis très très loin de taper autant que je le pourrais, je me retiens parce que je ne fais, en fait, que raconter mon vécu et que, désolé, mais je ne suis pas aigri même si ces lignes peuvent laisser entendre le contraire. Je comprends qu’on le pense puisque ça rejoint la critique que je formulerais plus tard sur les critiqueurs justement. Il est normal de répondre à ses détracteurs mais je le fais de manière courtoise et correcte parce que je n’ai pas de raisons d’être véhément contrairement aux critiques que j’ai reçues.
- Je le répète une dernière fois parce que, malgré tout, les critiques touchent: je ne parle que de mon histoire et de ce que j’ai vécu donc je ne généralise pas, je ne parle que de ce que je connais, c’est à dire ma situation, et je suis sans doute prétentieux et imbu de ma personne, très bien, mais j’étais un mauvais prof et c’est un soulagement, à la fois, pour l’éducation nationale et pour moi que nos chemins ne se croisent pas plus avant, et ça ne me dérange absolument pas de le dire: J’étais un mauvais prof.
Je constate simplement que le corporatisme pousse certains à défendre l’institution. Ce corporatisme est surprenant quand on entend le discours de certains en salle des profs, et encore, davantage, quand on voit la faculté incroyable de mobilisation des enseignants pour que ce genre de situations ne se reproduisent pas, et pas pour moi, à titre personnel, je n’ai plus rien à gagner et même ça ne m’intéresse plus, mais pour les suppléants, contractuels qui sont légions dans les établissements et dont désormais,la situation est connue puisque certains semblaient clairement l’ignorer. Je considère, que comme vous ne faites rien pour que cela change, que vous cautionnez ce traitement de l’EN. Alors, critiquez moi si cela vous chante mais clairement, vous ne faites que confirmer, à mes yeux, que l’EN est une grande famille bien particulière. Mais, c’est une famille. Et oui, je suis prétentieux bla bla bla et oui, je suis aigri bla bla bla et oui, je généralise si vous voulez….
Donc, quand les titulaires se mettront en grève, ou bien feront de véritables actions, (il n’y a pas que la grève), pour défendre, et surtout améliorer le statut des suppléants, alors, je considérerais que vos critiques sur ma généralisation est recevable. Pour l’instant, la seule chose que je constate, c’est que, beaucoup ont oublié qu’ils ont un jour été suppléant et que, perdre une journée de salaire ou je ne sais quel avantage inconnu reste inenvisageable pour défendre les collègues. Vous traitez les suppléants comme des collègues. Prouvez le. Vous pourrez, ensuite, me critiquer. Pour l’instant, à mes yeux, et aux yeux de beaucoup de personnes dans la société hors EN, vous n’êtes qu’une corporation plaintive et égoïste qui oublie ce qu’est le monde réel qu’elle vise, pourtant, à enseigner aux jeunes. C’est un élément flagrant de ce que ma nouvelle position m’a appris. Vous vous plaignez que le reste du monde ne vous soutient pas quand vous êtes en action mais vous refusez de soutenir le reste du monde quand il est en action et pire, vous refusez de soutenir les membres de votre propre corporation pour conserver vos propres privilèges statutaires. De loin, désormais, je pense, modestement, que si l’école doit un jour s’améliorer, en France, cela ne passera que par les enseignants et, grâce aux enseignants, mais j’en viens, en toute prétention de ma part, à me demander, si cela est réellement la volonté de la majorité des enseignants. J’ai dit la majorité!!!! Il n’y a pas de généralisation!
Ouch ! Je partage ton ressenti pince moi ! Et que les imbus distillent leur vinaigre n’est en rien une surprise, ils devraient peut-être boire plus souvent !
Le problème est qu’ils boivent surtout la liqueur qu’on leur sert
dès fois il est nécessaire de tirer un trait afin de s ‘ apercevoir que notre place n ‘ était pas là … d ‘ ailleurs ou est t- elle? au final on en sait jamais rien mais le principal c ‘ est de chercher de vivre de faire remonter les taux d ‘ excitation ceux même qui font de nous des hommes quitte à faire des folies et là seulement on devient libre ;;;;;
Insister toujours et encore sur la faculté à faire des conneries de bonne foi… encore et toujours… parce que l’excitation est plus importante que la raison et que la vie est courte… trop…
C’était au mois de septembre… première rentrée sans faire le prof… il y a des remous… donc depuis recherche de la place mais au moins elle n’est clairement pas dans l’éducation nationale…donc j’accumule les folies pour accéder à la liberté… je vais même aller faire les courses là pour signaler ma liberté absolue et honnêtement un supermarché avec 10 clients c’est le luxe…
Pour ce qui est de mon expérience de titulaire, j’ai toujours été bien plus cool avec les vacataires et suppléants qui amenaient un peu d’air frais et de légèreté dans mon établissement mais c’est vrai que les autres profs ne leur disaient pas souvent bonjour (je ne veux pas généraliser non plus…)
En fait, je crois que malgré tout la plupart dit bonjour… le mépris est plus un mépris de classe je crois… une distinction d’échelle… pas de niveaux en fait, même pas… juste une distinction catégorielle qui n’a pas lieu d’être au final …
Tout est vrai dans ton analyse! Même si ça fait grincer des dents… Je vis la même chose depuis 20 ans (eh oui!) en REP dans la région parisienne… Contractuel malmené et critiqué par la hiérarchie, les collègues jaloux, ben si! (face aux élèves qui te respectent et aiment ton cours alors qu’eux sont souvent chahutés)… Je me sens comme toi: C’est quoi ce programme qui ne fonctionne pas mais qu’on t’impose coûte que coûte? Pourquoi essaie t’on de nous faire rentrer dans des moules qui ne nous conviennent pas (remplacés par des robots, voilà la solution!)? Pourquoi mes idées, qui fonctionnent sur le terrain, sont tout de suite critiquées? Même le discours des formateurs nous rend dingue: citoyen de demain? avec ce programme? ben montrez-nous! euh non parce que vous comprenez je suis détaché, formateur de formateurs, mais j’ai eu des ZEP aussi je sais ce que c’est!…bla bla bla! Quand on voit le résultat!?! Faux nul zéro!
Oh totalement désolé je n’avais pas vu votre message… Je suis très en retard sur la réponse de fait mais je partage totalement votre analyse
Il y a une très grosse majorité des enseignants qui œuvrent chaque jour pour les élèves mais ceux là ne sont pas écoutés… jamais. On préfère (le on étant ici les décidants) écouter les théoriciens, ceux qui pondent des livres comme les profs corrigent des copies. efficacité. Et tout cela nous donne des lois, des programmes, des dogmes, des principes à suivre, à adopter, à aimer même si sur le terrain on sait que ça ne fonctionne pas et que ce que patiemment chaque enseignant impliqué construit avec ses élèves est bien plus efficace. mais l’efficacité ne compte que pour la correction des copies et surement pas pour l’élévation de la réflexion et du sens critique.