
C’est une tempête qui me porte vers toi. C’est ce souffle venu d’ailleurs qui change tous les effets, toutes les certitudes, tous les maux. C’est cet air, cette onde qui bouscule les dunes des déserts et qui fait tourner les têtes les plus fortes. Et ce vent qui me porte vers toi ramène les pleurs, les larmes, les coups et toutes ces choses qui ont construit la chute. Les nuages sont poussés trop vite. Il n’y a plus le temps d’admirer les étoiles, il n’y a plus le temps de les transformer et elles restent les mauvaises étoiles sous lesquelles sont nées nos dernières illusions.
Et ce vent efface toutes les traces écrites dans le sable dans lequel respiraient encore les dernières promesses d’une histoire différente, d’une histoire qui portait l’un vers l’autre les évidences des corps et des êtres faits pour ne pas être séparés mais qui le sont et le resteront désormais. Chacun de son côté, chacun de son monde, à contempler sa propre mauvaise étoile en attendant l’orage qui lavera définitivement les plaies.
Toutes ces images qui ne font que me ramener vers toi et qui bercent les derniers espoirs des décédés des millénaires précédents lancent dans les airs les feux d’artifice qui écrivent ton nom dans les cieux au milieu de nos étoiles contraires, de nos mauvaises étoiles. Et ce nom résonnera dans des centaines de ruelles pavées, dans des millions de gouttes dans les canaux et sur des dizaines de fleurs pendues sur les balcons ombragés des fenêtres ouvertes sur les rayons des soleils d’été. Et les centaines de vagues qui heurteront les quais pour mourir danse cri de ton nom qui résonnera sur les palais pour emplir encore toutes les vies de sa présence. Et les inondations traversées encore et encore en entendant siffler ton nom et les tempêtes maritimes affrontées sur ce petit bout de terre au milieu du vide pour pouvoir coucher sur les papiers volants dans la pièce nue les mots que tu ne liras jamais et qui pourtant continuent de te rendre vivante malgré ton départ.
C’est ce vent qui me pousse tellement fort vers toi qui continue de porter l’odeur de ta peau dans un souffle mortel d’orages d’été. Une odeur de jasmin qui ne meurt pas et qui empreigne les murs et les étoiles les plus lointaines, une mauvaise étoile qui reste ma seule compagne dans mes nuits sans sommeil à errer dans une ville qui n’est pas la mienne mais qui me retient parce que tu n’y seras pas. Ce vent qui nettoie les chemins poussiéreux de mon âme et découvre les planètes sans nom qui me porte toujours vers toi, m’amène toujours vers toi mais je reste dans cette ville étrangère pour ne pas me blesser, pour me protéger de ta mauvaise étoile qui luit sur moi.
Et maintenant que les bateaux ne peuvent plus ensevelir mes rêves, je peux enfin regarder à nouveau les époques passer, les jours mourir et les heures frapper comme les balles qui transpercent les plus courageux d’entre nous, les amours défuntes dispersés dans les univers inconnus par ce vent qui me pousse vers toi. Dans mes meilleurs jours, je me surprends à sourire et à oublier ma mauvaise étoile.