Back Home 2

C’est surtout par des petits détails que tu vois que tu t’es longtemps absenté d’un endroit, d’un lieu. Ce sont tous ces changements qui semblent n’être que le quotidien de chacun et que tu découvres comme une violence visuelle imprévue. Tu croyais revoir les mêmes pierres, les mêmes bâtisses, peut être même les mêmes pierres, tous ces repères que tu avais et qui formaient ta vie passée, tout ce qui construisait ton monde avant qu’il ne s’efface par ton départ. Tu voulais croire que le monde s’était figé à attendre ton retour, croire que rien ne changerait tant que tu n’aurais pas donné ton accord. Naïvement, je croyais être de ces gens là, être de ceux qui donnent le signal pour démarrer les transformations. J’espérais même que finalement le monde allait m’attendre pour amorcer ses transformations, qu’il serait patient et à l’écoute de mes envies.
C’est ce réveil brutal, cette violence envoyée par l’essor des deux roues de toute sorte qui me montre que définitivement le monde tourne sans moi. Partir n’influence, en réalité, véritablement que celui qui part parce que le reste du monde continue sa progression, pour ne pas dire qu’il s’en fout. Et là tu vois d’autres modes, d’autres compréhensions, d’autres perceptions de la vie autour de toi.


Soudain, tu comprends que, malgré toutes les campagnes publicitaires et de prévention sur le sujet, l’homme, dans son acception générique d’humain, refuse désormais de marcher et que seules les deux roues sont un véritable moyen de transport. A base de trottinette et d’overboard, le temps parisien se décline avec l’abandon négligeant de ces objets sur le bas côté de la route. A n’importe quel croisement de n’importe quelle rue, tu peux tomber nez à nez avec une trottinette électrique abandonnée et qu’un esclave moderne récupérera en le jetant négligemment encore une fois au fond d’un camion de location pour être rechargé et remis dans le grand bain de la collectivité.


C’est par ce type de détails et de transformations totalement improbables que la prise de conscience se fait. C’est par là, par la futilité des petites actions que la transformation du monde s’opère sous mes yeux. Plus encore que les tentatives marketing vestimentaires de décathlon ou les discours sans fin ni faim d’un gouvernement aux abois, c’est bien par ce que le quotidien offre que ce monde évolue. C’est bien par ce que le monde ne m’a pas attendu qu’il évolue à son rythme et même si ces modifications ne sont pas celles que j’aurais voulues, elles sont l’image que renvoie cette époque, marcher c’est trop dur, , prendre le temps c’est trop compliqué et perdre du temps, ce n’est pas en gagner sur la vie et la contemplation. Toujours plus vite, toujours plus ridicule, toujours plus motorisé, toujours plus assistés mais toujours plus productifs.

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