Amalgame et moi…

Sur les fonds baptismaux des brumes éparses que mes souvenirs devraient construire et que mes réalités avaient détruits, j’ai cherché longtemps et ailleurs le sens giratoire d’un accomplissement particulier et parcellaire dans lequel j’aurais pu ou dû trouver la clé de ce que j’envisageais être moi ou au moins ce qu’il aurait dû être sans toutes les choses que j’avais ratées. Ce soleil éblouissant, écrasant, brûlant jusque sous la peau, ce léger vent qui chauffait encore davantage les ruelles et les passages interlopes et où même l’ombre pesait des tonnes sur les épaules dénudées. Toutes ces épaules sur lesquelles, on s’empresse de peinturlurer des horreurs tribales sans la moindre considération pour le pauvre quidam qui passe nonchalamment au milieu des merveilles et se retrouve nez à nez avec ces dessins baveux et décatis, laids et vides de sens. Certains prétextent un sens personnel, une signification supérieure, quasi mystique même, en tout cas hautement symbolique qui fait que seuls les intéressés peuvent comprendre le sens profond de toutes ces lettres ou signes ou dessins qui tombent en ruine sous les affres du temps, du soleil et du mauvais gout. Puisqu’il s’agit de symboles incompréhensibles pour le perdu que je suis, en ce cas, pourquoi m’imposer ce que je ne peux comprendre, pourquoi m’imposer une telle profondeur d’esprit indicible et de toute façon indéchiffrable. Il s’agit d’une sorte de conflit, de guerres entre ceux qui imposent et ceux qui subissent cette viande saoule au hasard d’une route ou d’un chemin, d’une allée ou d’une ruelle. Le soleil se rappelle à notre souvenir et c’est une collection de graffitis cutanés qui explose aux yeux de la victime innocente que je croyais être. La rue n’est pas un musée et les œuvres d’art que je considère comme ratées, ne sont pas celles devant lesquelles je m’évertue à stagner, dans le désir de comprendre, enfin, le sens caché de la formule baveuse inscrite en lettres gothiques, sous l’avant bras pendouillant d’une mère de famille grasse, en débardeur rose délavé du plus mauvais gout. Une constante qui semble s’inscrire dans le paysage sérénissime, la mère promenant son landau avec un bébé rougi et boursouflé par la chaleur, et un autre, ou même deux autres enfants, courants autour de l’équipage, en criant, comme de bien entendu, avec cette volonté manifeste que tout le monde repère qu’il ne s’agit pas là d’autochtones. Une langue incompréhensible, hurlée à travers les ruelles, un landau inapproprié à la visite d’un lieu construit autour d’escaliers, de ponts et de pavés et lorsque le regard trouve enfin la provenance de cette ignominie, un tee shirt rose… Et là, tu te surprends, toi, à comprendre la langue proférée par ce groupe… et tu repenses à ce couple de braves retraités qui se baignent allègrement dans le canal à la vue du monde entier et tu te dis que là encore, tu comprends la langue… et comme par hasard, comme s’il fallait un signe en plus pour qu’on reconnaisse véritablement l’origine, des tatouages.. Parce que la reconnaissance tribale, c’est important… que tout le monde sache enfin , le hasard n’existe pas et le tatouage réunit ceux qui ont compris… au détriment de ceux qui ne veulent que profiter de la beauté du monde…

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