Brûler le livre

Enfin, après que les mondes se soient effondrés, les rivières de larmes, des cicatrices s’ouvrent et vident les corps de leur sang, le soleil se lève. Les jours deviennent trop courts pour regarder le soleil dans les yeux.

A chaque fois de nouveaux désirs, de nouvelles énergies, de nouveaux projets qui renvoient les catastrophes du passé au fond de ma mémoire. Pendant des mois, j’ai essayé de négliger ma vie pour la regarder de loin et l’observer se décomposer.

A la fin du voyage, j’ai trouvé cette sorte de promontoire d’où je regarde le monde s’effondrer, les gens délirer ou se rebeller contre tout ce qu’ils n’ont pas vu et qui, de toute façon, est totalement une blague, en fait.

Et pendant longtemps, j’ai essayé d’ignorer toute cette douleur qui me rongeait, mais aujourd’hui, étrangement, alors que la lumière s’allume soudain, je souris au souvenir de cette douleur solitaire qui m’accompagne depuis si longtemps.

J’ai oublié que j’avais brûlé le livre. J’avais juste besoin de suffisamment de temps pour remplir mes journées pour réaliser que j’avais gâché les précédentes.

Ainsi, je peux calmement regarder le monde s’effondrer, sourire à nouveau, respirer à nouveau, marcher à nouveau et réaliser soudainement que je vaux plus que ce que j’ai eu jusqu’à présent.

Alla fine, dopo che i mondi sono crollati, i fiumi di lacrime, le cicatrici si aprono e svuotano i corpi del loro sangue, il sole sorge. Le giornate stanno diventando troppo brevi per guardare il sole negli occhi.
Ogni volta nuovi desideri, nuove energie, nuovi progetti che rimandano le catastrofi del passato in fondo alla soffitta della mia memoria. Ho cercato per mesi di trascurare la mia vita per guardarla da lontano e osservarla decomposizione.
Alla fine del viaggio, ho trovato questa sorta di promontorio da cui guardo il mondo cadere a pezzi, la gente va in delirio o si ribella contro tutto ciò che non ha visto e che, comunque, è totalmente una presa in giro, in realtà.
E per molto tempo, ho cercato di ignorare tutto questo dolore mentre mi rosicchiava ma oggi, stranamente, poiché la luce si accende improvvisamente, sorrido al ricordo di quel dolore solitario che è stato con me per così tanto tempo.
Dimenticavo, ho bruciato il libro. Avevo solo bisogno di quel tanto che bastava per riempire le mie giornate per capire che avevo sprecato quelle precedenti.
Così posso guardare con calma il mondo cade a pezzi, sorrido di nuovo, respiro di nuovo, cammino di nuovo e improvvisamente mi rendo conto che valgo più di quanto ho ricevuto finora.

Voleur d’ombres (4ème époque, Episode 15) Passaggeri del vento

Et soudain, elle se dit qu’elle était folle.
Plutôt que l’univers autour d’elle sombrait dans une triste mélancolie et qu’elle se devait de s’accrocher à ce monde en perdition. Rien ne semblait ne pouvoir la contredire. Elle se sentait enfin réelle, vraie, parce qu’elle ressentait au plus profond d’elle-même cette envie d’être folle, d’être submergée, d’être envahie et de lancer au monde les phrases qui la brulaient en dedans. C’est cette folie qui la sauverait parce qu’elle savait déjà qu’elle ne pourrait jamais aimer davantage. Elle ne voulait plus être futile, banale, demeurer creuse. Elle voulait bruler comme toutes les rues qui avaient brulé pour purifier la ville, comme tous ces flambeaux qui, partout, avaient éclairé les sestieri, comme si les enfers étaient descendus sur terre et qu’ils venaient laver les affronts de toutes ces vies pécheresses.
Il fallait qu’elle brule et qu’elle brule autour d’elle tant son envie de bruler devait envahir ce qui restait. Déjà, la possibilité du départ l’envahissait. Elle voyait la silhouette vaporeuse s’éloigner au loin et rejoindre la ligne d’horizon. Elle sentait ce monde trop vaste la dévorer, l’engloutir, l’avaler. Pourtant, elle se sentait toujours exister et même plus que jamais. La folie de vivre, l’envie d’exister, la rage de respirer encore et de vivre ce qu’il y avait à vivre, là, en cet instant, la maintenait debout, droite, forte même couchée sur le marbre froid de la Salute, même nue dans les lueurs du jour qui se levaient. Le sentiment que l’impossible allait survenir du parvis, que tout était dirigé, décidé, construit, ailleurs, au dessus, partout.
Sa vie même s’était évadée d’elle et semblait flotter au dessus dans une danse macabre. Elle savait qu’elle n’avait pas assez de temps pour en perdre alors elle voulut sombrer et tomber dans l’existence pure, complète, lourde. Celle que les autres ne vivent jamais à force de rester eux-mêmes.
Elle se crut maudite, elle se crut reniée, rejetée.. Repoussée, seule, nue, perdue, elle se savait partie vers un voyage à travers tous ses cauchemars, à travers ces vies qu’elle n’avait pas voulu vivre. Elle laissait tout derrière elle et se lançait dans le vide de l’avenir. Elle vivait la brulure, la morsure comme lorsque l’autre quitte la route pour prendre un autre chemin, ailleurs, vers une autre destination, vers un nouveau monde où l’on n’est plus la bienvenue, où l’on n’est plus rien, même pas le souvenir de ce que l’on a cru être, même pas le souvenir de ce qu’on a voulu nous faire croire, juste le rien de retour à sa substance.
Evidemment, tous les hommes s’étaient moqués d’elle, lui avaient menti, parfois même la méprisaient. Ils en aimaient d’autres, ailleurs, autrement, comme ils ne l’avaient jamais aimée, elle, de toute façon mais elle revenait toujours. Elle en avait besoin. Elle savait, comme d’autres, qu’elle serait trahie, qu’elle serait détruite et pourtant, elle aimait cette brulure, cette blessure, cette force venue de nulle part mais qui la rendait juste vivante et elle voulait être vivante après tant d’inertie, tant de vides, tant de moments perdus à attendre que l’autre se souvienne enfin de l’existence, de ce qui donne sens, de ce qu’il y a et de ce qu’il reste à vivre. Que l’autre soit enfin ce qu’il prétend être, que l’autre parle pendant des heures et soudain, s’aperçoive qu’il est seul, que l’autre ne vive pas si elle est absente et qu’elle ne vive que si l’autre est présent.
Elle voulait juste que chacun tienne enfin son rôle d’amant aimé, d’amoureux aimant, d’incendiaire brulé. Elle voulait être la lune et que l’autre soit le soleil et que le monde devienne une éclipse. Elle voulait tant de choses qui finalement n’existaient pas, tant de rêves que le monde avait brisé, tant d’espoirs, tant d’envies qui, aujourd’hui, n’étaient plus qu’un voile flottant au dessus d’elle dans le cœur de la nef de la cathédrale de la peste.
Elle devinait que son monde ne pouvait survivre sans tempêtes et elle vivait sans lutter mais elle aurait tant voulu connaitre des jours d’accalmie, des jours de grand soleil, des jours de fêtes. Elle brulait de l’intérieur, elle brillait de l’intérieur, elle était visible mais elle se consumait de ne pas être celle qui voulait que ce soit lui.
Et elle dit au fantôme qui la regardait tendrement qu’il savait déjà qu’elle ne pourrait jamais l’aimer davantage.