Fonctionnaires (partie 4) – La semaine politichienne de Smig

 

Elle avait vécu, avant, il y a longtemps, dans une autre vie, une vraie belle histoire de cul, peut être même d’amour; elle ne le saura jamais en fait. C’était il y a sept ans maintenant ou peut être même davantage, le temps passe si vite quand tous les jours sont les mêmes. Un de ces suppléants envoyés à l’abattoir par un rectorat incompétent, encore empli de fougue et de naïveté quant à ce métier, lui avait montré une autre face de la pièce de sa vie. A jouer à pile ou face, puisqu’il n’avait rien à perdre, puisqu’il n’existait pas pour l’éducation nationale, il avait réussi à lui faire croire qu’elle était belle et désirable. Il avait même réussi à obtenir d’elle des faveurs inconnues et des actes inédits.

Sa situation professionnelle, son incertitude professionnelle, avait fait qu’elle avait exigé de lui des sacrifices, qu’elle avait réclamé, ordonné, imposé, obligé et, à force qu’il réponde à ses ordres en faisant toujours tout pour que ce soit pour le mieux, elle s’était lassée. Elle s’était comportée comme une vraie connasse mais elle ne l’avait compris qu’une fois qu’elle l’eut largué, comme une merde comme on dit, pour retourner dans les bras de son ex alors qu’elle savait déjà pertinemment qu’il n’en avait cure de ce qu’elle était. Elle était le symbole ultime du paradigme de la femme insupportable.

Son ex était réapparu de nulle part, grâce aux réseaux sociaux. Ils étaient, elle et lui, restés sur un non dit, sur une histoire finie sans l’être. Il était parti pour une autre. A l’époque, elle avait cru que c’était en raison de la pression familiale, de l’argent, de la situation sociale, alors, il fallait qu’elle soit sûre, qu’elle connaisse la hauteur de ses sentiments, quitte à se séparer avec pertes et fracas d’un homme qui l’aimait sincèrement mais il fallait qu’elle sache.

Alors, elle avait tenté l’aventure du retour de l’enfant prodige, de celui qui l’avait fait chavirer adolescente et jeune femme. Elle voulait être sûre, elle le fut. Comme la première fois, il prit ce qu’il avait à prendre et qui ne nécessitait pas d’investissements trop forts et partit une nouvelle fois, ailleurs, avec une plus jeune, plus belle, plus fraîche et sans doute même, plus riche. Son hybris l’avait perdu et désormais, il était trop tard pour construire autre chose.

Elle avait bien des aventures mais avec des hommes sans intérêt, rencontrés au hasard du net ou de vagues soirées désuètes et provinciales. Ce type de soirées où tous les gens se persuadent, eux mêmes, qu’ils ont de l’importance, qu’ils ont de la valeur. Ce type de soirée où l’impression de faire avancer le monde est la valeur la mieux partagée entre tous, mais où, finalement, le soir même, chacun dans son lit, seul, s’aperçoit qu’il ne se passe rien et que les jours tristes succèdent aux jours gris et que la révolution n’est pas pour demain parce que demain, d’abord, il faudra dessaouler et supporter la présence de la personne qui dort à côté et qu’on a déjà oublié.

Elle avait laissé passer sa chance et la litanie de sa vie se résumait à cela, une succession de passages à côté pour ne conserver finalement que le médiocre. Elle était devenue, malgré elle, tout ce qu’elle refusait de devenir quand elle entra dans la profession. La prof aigrie à cause de ses élèves, de son quotidien, de sa vie de célibattante mais davantage comme une porte que comme les féministes, ou appelées comme tel, qui écumaient les plateaux de télé des chaines d’info en continu, à côté des vegan qui saccageaient les boucheries, des barbus qui défilaient avec les antifas et des politiciens qui promettaient l’avenir en rose avant de s’apercevoir qu’ils avaient un nombre de procédures aux fesses équivalent à la moyenne générale de ses classes, depuis la énième réforme de l’éducation nationale que, comme les anciennes, elle n’avait pas comprise.

Elle enseignait une discipline dont tout le monde se foutait finalement. Il suffisait de partir en immersion quelques mois pour se persuader qu’on maîtrisait la chose. Après sept ans d’enseignement subis par les élèves, à raison d’au moins trois heures par semaine, ils étaient toujours incapables de demander l’heure ou de ne pas pleurer s’ils se perdaient dans le métro. Bien sûr, c’était la faute des élèves qui trichaient aux contrôles ou examens en se refilant les réponses, comme si elle allait prévoir une interro différente pour chaque classe. La faute d’un système qui exigeait qu’il y ait des évaluations de tout, tout le temps, sur tout, même sur le rien. La faute aux collègues qui se plaignent en permanence, qui font sauter des heures, qui ne font rien, qui en font trop, qui sont absents, qui dénoncent, qui sont juste des humains avec tous les travers exacerbés dans un huis clos irrespirable de jalousie. Jalousie parce qu’elle était mieux payée qu’eux grâce à l’ancienneté, jalousie parce que les élèves l’aimaient bien ou ne la supportaient pas, jalousie parce que son thé est meilleur que celui de la machine, jalousie pour ci, jalousie pour ça, pour être une prof et que les autres le sont aussi mais différents. Se détester entre soi mais ne jamais oublier de se sourire. En tout cas, la faute de l’univers s’il le fallait mais surement pas la sienne.

Bien sûr, elle avait entendu les récits des gens qui disaient que c’était pareil dans tous les métiers et pourtant… Des nuits entières, elle avait rêvé à ce qu’elle pourrait faire d’autre, ailleurs. Des nuits entières, elle s’était battue avec elle même pour changer de tout mais des journées entières, elle manquait de courage pour ça. Il fallait payer les traites de l’appartement, remplir le frigo et nourrir le chat, alors, tout plaquer, pour chercher mieux, pour vivre mieux dans la tête, ça n’était pas possible et puis, maintenant, elle était trop vieille pour passer à autre chose alors, elle ferait encore quelques rencontres parents profs, jusqu’à tard le soir, en sachant que c’est totalement inutile.
Alors, elle enquillerait encore des conseils de classe pour se croire importante, alors que, fondamentalement, il y a peu de choses qui soient plus inutiles que ça. Alors, elle ferait encore quelques voyages en espérant qu’elle pourrait même obtenir d’aller plus loin, comme aux USA ou en Chine, parce que c’est très loin, parce que c’est bien et parce que c’est au moins deux semaines sans le quotidien. Des sortes de vacances de soi plus que d’autre chose.

Tout cela était devenu son quotidien circulaire, les cercles dantesques. Se dire, j’aurais dû ou j’aurais pu et faire payer aux élèves, le fait de ne pas l’avoir fait. Faire passer toutes les douleurs physiques inventées par le psychique comme des raisons de se plaindre, de se faire plaindre et de se lamenter. Avoir comme excuse définitive, les douleurs cervicales inexistantes pour ne pas bosser, ne pas baiser, ne pas partir, ne pas innover mais faire pleurer dans les chaumières ou au moins, espérer attendrir suffisamment pour en faire encore moins la prochaine fois et recommencer le lendemain… Passer l’année à se reposer sur l’empathie des élèves, des collègues, des parents et prier pour que ça tienne longtemps et, dès que le mur de l’indigne se fissure, demander et obtenir sa mutation, parce que les points, ça rapporte et recommencer la même chose dans un ailleurs et tant que ça tient, tout va bien… Bientôt la fin, bientôt la retraite et les séries nulles en milieu de journée et attendre la fin puisque finalement, tout cela n’a pas vraiment de sens.

Fonctionnaires (partie 3) – La semaine politichienne de Smig

 

Alors, elle sort d’un geste machinal son exemplaire d’un petit opuscule, tout simple dans sa conception. Un petit livre court: Scriptrice de Carla Pauppe. Elle le relit. Elle l’a trouvé, la première fois, très bien mais trop court alors, elle a peur, comme elle l’a toujours pour tout, d’avoir manqué des choses importantes et elle préfère le relire pour se rassurer.

Le trajet est lent parce qu’il y a toujours de la circulation le matin. Entre les travaux et la pluie, les conducteurs ont la fâcheuse habitude de ne pas avancer et de rouler à une vitesse proche du sur place. Ces ralentissements lui permettent, néanmoins, de terminer la lecture de sa nouvelle qu’elle trouve décidément excellente. Le bus réussit, enfin, à atteindre l’arrêt proche du lycée. Elle arrive à la porte où la gardienne concierge l’accueille, comme à son habitude, sans lever la tête, avec un borborygme qui peut s’interpréter comme un bonjour. Enfermée qu’elle est dans sa cage d’accueil à répéter, chaque jour, les mêmes litanies aux mêmes personnes qui ne comprennent toujours pas les mêmes choses.

Traverser tous les jours la même cour, et gravir les mêmes escaliers pour atteindre la même salle des profs, avec les mêmes plaintes d’élèves réfractaires ou pas au niveau, les mêmes plaintes autour d’une hiérarchie sourde, aveugle et muette comme si un seul handicap n’était pas suffisant, et recommencer encore, comme hier, comme demain…

Et viendra le jour où il faudra se décider à lutter, se mettre en grève pour signifier sa désapprobation, son mécontentement et, éventuellement, défiler dans les rues tristes, grises, trempées par la pluie. Il faudrait poursuivre ce moment pendant des jours, des semaines peut être, mais jamais le corps enseignant n’acceptera de gagner une négociation. Il faudrait être dur et montrer sa détermination jusqu’à obtenir gain de cause mais les autres ne feront jamais ça, parce qu’ils ont trop peur de gagner, parce qu’ils sont les autres. Elle a toujours ce côté révolutionnaire en elle. Se dire qu’un événement finira bien par pousser ses collègues à se bouger mais, pour l’instant, elle fait comme tous les autres, elle refuse de perdre une journée de salaire parce que c’est trop coûteux et qu’en plus, l’état ferait des économies en ne la payant pas. Le combat des révolutionnaires déjà battus et déjà résignés.

Elle voit dans l’œil de ses collègues comme dans le reflet de son image dans les miroirs, les yeux se ternir, les peaux se flétrir, les rides se creuser, les enthousiasmes des débutants se faner et disparaître à force de déceptions cumulées. Déception face à la compréhension ou plutôt son absence et aux résultats des élèves; déception face à sa propre motivation qui fond comme neige au soleil, déception face à cette hiérarchie incompétente, absconse, inutile, absente ou trop présente, injuste; déception face au reste du monde qui ne comprend rien de son métier et de ses exigences et qui critique, qui critique et qui critique encore, qui juge et qui juge et condamne.

Depuis longtemps, elle a fait son deuil d’expliquer aux autres, ce qu’elle vit au quotidien. De toute façon, elle ne parle plus beaucoup à de « vrais » gens de la « vraie » vie. Quelques commerçants, éventuellement, mais sinon, son quotidien relationnel se trouve dans ses collègues et dans les collègues trouvés dans les groupes de discussion et sur les réseaux sociaux. Son métier n’a plus rien d’épanouissant et pourtant, elle se noie dedans, ne parlant que de lui, ne vivant que de lui alors qu’il la ronge petit à petit. Elle tente toujours désespérément de se donner un nouveau souffle, en se disant qu’elle fait tout cela pour ses élèves, que seuls, eux, sont importants mais, même cette ritournelle, elle refuse de l’admettre, est déjà une mauvaise histoire qu’on raconte aux enfants pour qu’ils finissent leur dîner. Les élèves ne sont là que, parce que, sans eux, elle n’existerait pas mais la prise de conscience que même avec eux, elle n’est pas grand chose est plus longue à accepter. Et aujourd’hui, ça devient tellement évident qu’elle refuse encore de l’admettre.

Fonctionnaires (partie 2) – La semaine politichienne de Smig

Auparavant, elle aura croisé le facteur dans le hall d’entrée. Comme les autres jours, ils se salueront mais il ne lui donnera pas de courrier parce qu’il y a bien longtemps que plus personne ne lui écrit. Les factures arrivent directement par mails, les lettres d’insultes des uns et de mécontentement des autres parviennent comme par magie, désormais, dans sa boite mail alors le facteur n’est plus qu’un quidam qu’on croise sans qu’il ne soit une existence réelle. Juste un porteur de gibecière dont personne ne sait plus ce qu’elle peut contenir.


Déjà, la faune vivante de sa petite ville provinciale se met en branle pour donner une illusion de réalité, de prise, d’emprise. Les roues des camions bennes qui circulent par secousses traversent l’eau que les véhicules de nettoyage et les balayeurs comme on disait autrefois ont déjà répandue sur les voies. Au loin retentira la sirène d’un camion de pompiers ou d’un samu, plus surement d’un véhicule de police lancé dans la quête du rétablissement de l’ordre alors que plus personne ne sait ce que ce mot veut dire. Une symphonie de bruits entre sirènes, jets d’eau, levage de poubelles, klaxons répondants aux cliquetis des sonnettes de vélo monte des travées de la ville. En même temps que le jour achève de se lever, la ville devient cette personne à la fois amicale et dangereuse, vivante et mortifère, douce et violente.
Aujourd’hui est une journée particulière. L’infirmière viendra dans la classe pour présenter son action dans l’école. Cette journée de décembre s’annonce plutôt calme puisque la police interviendra, ensuite, pour sensibiliser aux dangers des réseaux sociaux, de la circulation ou des drogues. Ou d’autre chose.


Elle monte alors dans le bus qui vient d’arriver et espère secrètement que Sami sera au volant. Elle aime bien Sami. Il est gentil et plutôt beau garçon. Il est jeune et il dit bonjour et merci et ça, elle en avait perdu l’habitude et même que très souvent, il sourit. Et puis, elle cherche une place dans ce bus vétuste et bondé. Longtemps, elle avait espéré que quelqu’un se lèverait et céderait sa place à une femme âgée mais elle s’était fait une raison. Entre les revendications féministes, identitaires et ce que devient la société, elle savait qu’elle resterait debout. Elle réussit à se nicher dans un coin. Ainsi, elle peut à peu près lire. Le confort est précaire mais comme elle n’est pas une fétichiste, elle peut corner le livre, le tordre et même le faire tomber sur le sol humide et sale du bus. Cette fine pellicule d’eau saumâtre et noirâtre qui stagnait perpétuellement dans ce type de transport en commun.

Fonctionnaires (partie 1) – la semaine politichienne de Smig

 

Elle se lèvera dans une lumière entre chien et chat. Elle aura passé sa nuit à tourner dans son grand lit vide et froid. Elle restera couchée, éveillée, à regarder les minutes passées sur son radio réveil en attendant que, enfin, l’heure du lever ne retentisse en diffusant les voix des donneurs de leçons radiophoniques.

Le monde va mal, les gens sont fâchés, le climat explose partout sur la terre et pourtant, elle continuera à se plaindre du manque de moyens de son établissement, du nombre d’élèves par classe, de la violence des parents, des frères, de la rue, se plaindre des salaires qui ne correspondent à rien et de la retraite qu’elle pense ne jamais connaitre. se plaindre aussi de la nullité des collègues et de l’incompétence de la hiérarchie, incompétence crasse, vulgaire, méprisante et méprisable.
Elle allumera machinalement la télé afin d’être sûre que le monde va vraiment aussi mal que ne le dit la radio. Quelque part, elle se sentira rassurée que les medias d’état disent tous la même chose. Que les fonctionnaires médiatiques crachent sur les autres fonctionnaires plus petits qu’eux, en continuant de vénérer les hauts fonctionnaires parce que, eux, ils ont le salaire, le prestige et la fonction. Ils ne font rien, ils ne servent à rien mais ils gagnent beaucoup et ils ont de l’influence alors qu’elle, pauvre petite fonctionnaire de l’éducation nationale perdue dans une province oubliée, ne mérite pas qu’on s’attarde sur ses problèmes.
Personne pour écouter ses envies, même le dernier homme avait cédé face aux plaintes récurrentes. Il n’était pas du métier, il ne pouvait pas comprendre.


Elle nourrira son chat parce que, avoir un chat, est une obligation mythologique dans son monde. Elle aurait aimé en avoir d’autres même, mais le vieux félidé qu’elle traînait depuis si longtemps ne le voyait pas du même œil.
Alors, après les travaux de ravalement d’usage pour camoufler l’aigreur qui commence à se dessiner sur son visage, à moins que ce ne soit l’âge tout simplement, elle descendra son vieil escalier en faux marbre et à la rampe en teck industriel.


Elle attendra gentiment son bus en regardant son fil de Facebook et verra tous les messages de toutes ces personnes qui ne savent même pas qu’elle existe. Elle voudra commenter. Elle voudra participer et puis, elle renoncera parce qu’elle ne supporte pas la haine des réseaux dits sociaux qui ne font que déchirer la société.

Si la majorité devient mineure – La semaine politichienne de Smig

On peut toujours se dire que ça ira mieux demain, en l’occurrence dans deux ans et demi et croire dans des lendemains qui chantent et au grand marché commun.

De fait, l’individualisme devient la première religion, la valeur refuge, et chacun prône pour la reconnaissance de sa propre particularité, de sa propre souffrance, le plus souvent ressentie que vécue.

Ainsi, sous prétexte de souffrance animale, un groupuscule exige le retrait des tableaux de maître représentants des scènes de chasse ou de banquets avec des viandes et/ou du gibier.
Ainsi, sous prétexte de pudibonderie, un groupuscule, ou plusieurs, réclame le retrait des œuvres d’art représentant des femmes nues ou dénudées ou insuffisamment couvertes.
Ainsi, sous des prétextes religieux médiévaux, certaines personnes vivants sans doute dans des grottes, menacent des pires sévices le monde, si les œuvres d’art représentant des hommes nus n’étaient pas interdites à la vue. Il faudrait même sans doute les détruire comme les bouddha en Afghanistan, on gagnerait du temps.

Dès lors, s’interroger sur le bien fondé de telles demandes (il n’y en a aucun, que ce soit bien clair) revient à donner une visibilité à l’expression de minorités qui ne souffrent même pas. Ne pas aller dans un musée n’est pas en soi une souffrance, d’autant que les personnes pleurnichant n’y allaient pas avant. Pas de changement donc quel intérêt de manifester ou de se plaindre ou de lutter pour supprimer quelque chose que, de toute façon, on ne faisait pas avant? De toute façon, il n’y a pas lieu d’argumenter. Les opprimés sont légions, nous le sommes tous, finalement, et ils ont toujours raison, donc forcément, tu as tort.

Tu veux porter un parasol dans le cul même si ça empêche tout le monde de se garer? T’as raison! Et qui sommes nous pour t’empêcher de vivre comme bon te semble? Ce n’est pas comme si nous devions faire société ou un truc dans le genre. Tu veux interdire les statues de nu, les toiles avec des animaux, les caricatures, les reproductions (sous toutes ses formes d’ailleurs), tu veux pouvoir porter le voile, crier que tu es une victime de la colonisation finie depuis 60 ans, de l’esclavage fini depuis deux siècles. Tu veux pouvoir dire que tes parents ont reconstruit ce pays (pendant que les autochtones se la coulaient douce à Juan les pins puisqu’ils sont sionistes), tu veux pouvoir dire que ta famille a subi de plein fouet l’esclavage, même s’il n’y a plus aucun survivant, tu veux pouvoir crier que tu es victime des pires soeurs zombres de l’histoire, il y a 80 ans, ce qui avouons le, ne nous rajeunit pas, alors, fais le ! De toute façon, l’état te donne ce droit et te le renier serait un outrage à l’état, à dieu, aux lois, à l’univers, au cassoulet, à l’habeas corpus et aux huîtres.

Il faut donc pouvoir se considérer comme minoritaire parce qu’on est une femme, ou noir, ou lesbienne, ou musulman, ou vegan, ou écolo ou socialiste ou maradonien et toute cette énergie mise dans la reconnaissance de cette pseudo souffrance doit se faire à l’encontre des autres. Cet autre qui est par définition, blanc, catholique, homme, vieux ou cinquantenaire, cadre ou assimilé, cultivé ou érudit ou en quête de l’être. Dès lors, puisque toutes les minorités s’agrègent contre cet individu unique et que toutes les tensions se concentrent sur ce pov’ gars, il n’est pas stupide de considérer que finalement, la véritable minorité devient l’homme blanc , tout ça, tout ça… Il faut bien que j’assume mon statut de facho puisque l’obs a décidé qu’en tant qu’apostat , je l’étais par définition donc j’assume…