Je relevai lentement le regard vers le sien. Ses yeux étaient emplies de larmes non versées, mêlées à une rage sourde et contenue, mais elle comprit, je crois, à travers mon regard, que je connaissais plus qu’elle ne croyait cet état de solitude ultime, au milieu de la foule. L’idée que tout s’écroule et que la force d’en finir n’est pas suffisante pour partir parce qu’il y a peut être encore des choses à faire. Je ne savais pas quel était le reste de ma mission mais je savais que je vivais depuis trop longtemps avec cette foule vide dans la tête. Cette absence d’une présence au milieu des mondes énervés. Je laissais mes yeux plantés dans les siens, comme pour lire au plus profond de son âme, les choses qu’elle avait voulu taire de cette histoire minable d’amour adolescente, qui finit de manière merdique, en haut de la falaise d’Etretat. Tu t’es faite larguer par un connard à Etretat et tu en fais une fin du monde, comme si ça avait le moindre intérêt. J’aurais voulu lui balancer que ça faisait une heure qu’elle parlait, seulement, pour me raconter la même histoire que n’importe quel connard aurait pu me raconter, après trois whiskys. J’aurais voulu qu’elle comprenne que moi, comme n’importe quel pékin sur cette planète, avais vécu ça et plus encore. J’aurais voulu lui dire que son putain de bord de falaise, elle aurait dû le bouffer ou même s’y jeter, avec une once de courage et d’amour propre. Mais justement, le courage, je ne l’avais pas. Ce n’est pas que j’avais peur de la blesser, la pauvre, c’est seulement que je n’avais pas envie de perdre davantage de temps à endurer les plaintes d’une pauvre fille qui, au final, n’a rien vécu. Elle avait été malheureuse, la belle affaire. J’étais déjà mort trois fois et je n’en parlais à personne. Alors qu’elle me parle d’endroits que, elle seule, connaissait, avec un bellâtre inconnu, machine à orgasmes multiples, n’avait aucune chance de m’empêcher de dormir ce soir. Parce que je boirai mes trois whiskys, je fumerai mes clopes, je plongerai ma tête entre les seins d’une professionnelle ramassée quelque part dans l’improbable, ou bien je me plongerai dans un livre ramassé dans le bas d’une étagère de bibliothèque publique. Mais, quoiqu’il arrive, dans deux heures, j’aurais oublié sa détresse parce que ce n’est pas la mienne. Je suis trop vieux maintenant pour chercher l’endroit où je commencerais autre chose, où je trouverais la fin de tout, où je me demanderais si nous sommes les seuls à connaitre cet endroit. Je cherchais la vérité dans le souvenir du cadavre de Géraldine et le reste n’était que le quotidien obligatoire d’une survie aléatoire. Je marchais, moi, depuis longtemps déjà, sur ce bord de falaise, à regarder l’horizon anglais et à parler, seul, de ces lieux que je ne connais pas, mais qui sont ceux que j’aurai choisis pour me relier à l’autre partie de moi. Toute ma vie, j’aurais été ce funambule des roches maritimes et toute ma vie, désormais, je me répéterais que j’ai fait avec les moyens du bord de la falaise d’Etretat, ou d’ailleurs parce que, finalement, une falaise ou une autre, la chute fait aussi mal, au dessus de la mer, face à l’Angleterre, cherchant des yeux une improbable Amérique ou un autre ailleurs, où nous devions nous aimer, avec celle que je n’ai jamais rencontrée.
Mois : novembre 2018
J’ai fait avec les moyens du bord de la falaise 10…23
« Est-ce que tu crois que tu as besoin de quelqu’un ? On a tous besoin de quelqu’un, tu n’es pas le seul, même toi, tu as besoin de quelqu’un… Quand tu rentres seule chez toi, et que tu commences à te parler toute seule, personne ne te prépare à ça, personne ne te dit que ça va être comme ça. Tu regardes le monde seule, alors que tu le voyais à deux… Tu te dis que tu aurais dû partir plus loin, plus vite. Il n’y a que regrets parce que tu sais que tu as raté le moment où tu aurais pu basculer. Tu ne deviens que l’ombre de toi-même, le copié collé de ce que tu ne voulais pas être, le succédané de toi-même, remarque je dis ça, je crois que c’est le sens du mot mais je ne suis même pas sûre. Alors, tu passes par tous les excès pour t’oublier, tu bois, tu fumes, tu baises et tu recommences parce que, au moins, là, tu oublies, mais tu ne te jettes pas. Tu es à vie sur le bord de cette falaise mais tu ne te jettes pas. Tu vois les vagues taper le pied de ce mur mais tu ne te jettes pas et tu commences à partir dans ta tête. Tu sais que tu vas trouver les ressources pour repartir, pour exister, pour qu’il ne t’oublie jamais, que chacun de ses pas soit marqué de ton empreinte, que ton parfum soit l’odeur de l’air qui l’étouffe. Être partout autour de lui, en lui, et ne lui laisser aucune chance de vivre sans toi, hors de toi. Et tu pleures à nouveau et tu maudis cette nuit, tout en haut de la falaise, où tu te croyais protégée, dans ses bras, couvée, choyée, lovée et, naïvement tu crois que tu peux te laisser aller. Tu restes sans défense parce que tu es à l’endroit où tu sais que tu dois être, avec la personne qui doit être avec toi, à tes côtés. Et tu t’endors dans ce vieux plaid et tu sais que tu seras protégée. Tu sais qu’en haut de cette falaise, tu ne seras jamais seule parce qu’il est là, parce que tout ce qui compte est là et te retient. Et puis, tu te réveilles et tu es seule. Et soudain, tu es au milieu de nulle part, et personne pour te comprendre ou te reconnaître. Tu es seule parce que ce que tu croyais éternel est parti. Tu ne sais pas où, tu ne sais pas comment, ni pourquoi. Tu appelles, tu cherches partout du regard, même vers l’Amérique, au-delà de l’Angleterre. La faible lumière du jour t’empêche de voir jusqu’au bout du monde, la pluie des autres jours et des jours suivants tombe, maintenant, sur toi mais elle n’existe pas. C’était l’endroit où nous devions nous aimer, c’était là que se trouvait l’issue, en haut de cette falaise. Et quand tu comprends que c’est seulement toi, et désormais toi seule, tu te trompes, tu te mens mais j’ai fait avec les moyens du bord. J’étais seule au bord de la falaise et j’ai essayé de me reconstruire. Au milieu de nulle part et de la nuit, tu t’aperçois que tu n’es plus rien. L’autre est parti sans toi, ailleurs. Tu comprends. Tu cours au bord de la falaise, les yeux encore emplis de sommeil. Tu espères voir des traces de lui et, en même temps, tu ne veux pas voir ces traces, en bas de la falaise des suicidés, dans cette fin du monde balayée par les vents contraires, les pluies tristes et les vagues violentes. Tu veux croire à un mauvais rêve, que tu dors encore dans ses bras et qu’il va réapparaître. Tu sais déjà que tu ne reverras plus les jasmins de la cour des miracles. Désormais, tu vas devoir survivre en laissant la plus belle partie de toi en haut de la falaise de la côte d’albâtre et tu sais que tu vas devenir vieille et délaissée parce que tout est là bas et que seuls, vous deux, vous connaissez le lieu de l’abandon, de la fin du monde. Et pourtant, tu ne te jettes pas. Tu te prends à rêver que tu flottes dans les airs, que tu as trouvé le courage de faire le pas de trop, et que tu flottes. Mais tu ne t’es pas tuée.
Tu ne sais absolument pas de quoi je parle là, tu ne comprends rien à ce que je te raconte, hein ? »
J’ai fait avec les moyens du bord de la falaise 9… 22
« On se voyait pas tous les jours mais on baisait à chaque instant et puis, à force, il a fallu passer à l’étape suivante. Il a fallu échanger, discuter, se connaitre. Sans doute que j’étais trop subjuguée, déjà trop attachée par une dépendance corporelle mais très vite, l’idée de partager plus arriva. Je squattais chez lui souvent, restant à poil à réviser des cours pendant son absence mais attendant surtout fébrilement son retour pour encore s’envoyer en l’air. Mon statut d’étudiante m’offrait l’opportunité de six mois de vacances par an honnêtement. Et lui, il était libre, suffisamment à l’aise pour se sentir libre de partir aussi, loin, longtemps. Il nous fallait juste trouver l’endroit. Il serait seulement ce que nous en aurions fait. L’endroit où nous voulions nous aimer. L’endroit que nous avions toujours rêvé de construire et il était là, accessible. Enfin, fait pour nous. Il aurait dû être la fin de tout, il n’a été que le début de tout le reste. Un endroit que seuls nous avions envie de connaitre, seulement nous et le reste offert aux anges. J’étais fatiguée de chercher l’endroit où nous allions commencer le reste de nos vies. L’endroit qui allait accueillir nos rêves et nos espoirs. On a cherché longtemps. On a erré dans des lieux sans âme, ni histoire parce que nous savions que nous allions en construire une, d’histoire. Ça ne servait à rien de prendre un lieu déjà chargé. L’histoire commencerait avec nous. Nous serions l’histoire. Nous avons marché des heures sur ce sable humide, à travers les forêts de bord de mer et du haut de la falaise, on voyait les côtes de l’Angleterre. Les rares jours où il ne pleuvait pas, on croyait même voir les states, c’est ce qu’on se racontait enroulés dans nos vieux plaids. Il y a des choses qui ne s’expliquent pas et qui ne doivent pas s’expliquer finalement. Alors, je parle, et je te raconte ma vie et tu t’en fous… D’ailleurs, tu ne réagis même plus, t’es trop parti dans ton monde pour te soucier du mien. Mais là moi, j’ai besoin de me vider. Parce que tu ne sais pas ce que c’est d’être au point de non retour, d’être déjà parti dans un ailleurs où personne ne pourra te rejoindre. »
Je préférais continuer à faire le sourd, enseveli dans ses nuages. Elle avait besoin de se vider, je le savais, elle le disait, alors dans ces cas là, rien ne sert d’intervenir. Tu sais que, de toute façon, le débit devra se poursuivre, devra continuer jusqu’à saturation des mots, saturation de la langue, jusqu’à ce que les mots se chevauchent, se consument et finalement se taisent. Le moment où le silence devient la seule suite crédible d’une logorrhée obligatoire, parce que quasiment physique. Lorsque les mots que tu dois dire te brûlent l’intérieur à force de vouloir sortir. Il faut laisser sortir et, en tant que réceptacle auditif, je me devais, à ce moment là, de me taire. Je me taisais et je sentais l’odeur du jasmin fraîchement coupé ; je voyais les montagnes lointaines et je savais déjà, qu’encore une fois, je ne trouverais pas les réponses à mes questions sur Géraldine.
La semaine politichienne de Smig – Devenir aveugle au royaume des sourds
Troisième expression de ce qui caractérise l’extrême droite, le favoritisme vis-à-vis des personnes possédant la nationalité. Alors bien sûr, la bien pensance fait que certains croient encore avoir empêché l’arrivée des heures les moins claires et des sœurs zombres en renvoyant la blonde bretonne à ses chères études. Et pourtant… Oh certes, on peut imputer au gouvernement gélatineux précédent la fermeture des frontières terrestres, Calais ou Vintimille. On peut. N’oublions pas que l’économie était tenue par un Jupiter prépubère à cet instant, mais déjà dans la place pour la loi travail. Et puis, arrive l’aquarius et ses cours de géographie improbable. Ou comment depuis les rives de la Corse, le port le plus proche devient Valence en Espagne. Peut être même que Valence, dans la Drôme, qui n’est pas en bord de mer, aurait été moins ridicule pour ce gouvernement. Et puis, des « lâchers » de migrants en Italie et des lois Collomb. Mais, comme ça n’est pas la peste brune, le choléra bleu marine, tout va bien. Les faits, seulement les faits. La magie. Le champion déclassé de MMA en rêvait, le showman camerounais l’espérait, Jupiter le fit. La troisième expression de l’extrême droite est remplie au-delà de toutes les espérances munichoises ou berlinoises ou autres.
Quatrième expression, la défense de la tradition, l’anti parlementarisme, l’autoritarisme, la doctrine basée sur la race et les idées réac. On fait un combo. La défense de la tradition est bien un des éléments que les dieux de l’olympe du faubourg Saint-honoré n’honore pas. Il faut le reconnaitre, et pourtant, cependant, par exemple, on parle de l’uniforme à l’école pour rétablir une tradition anglaise ou usitée dans les départements d’outre mer mais jamais, en France métropolitaine. Sous des aspects de modernité qui, finalement, n’existent pas vraiment, on voit des comportements extrêmement réac de la part de la sous classe indigente non dirigeante. Il y a une défense de la tradition purement aléatoire qui, en réalité, ne fait pas une politique, ni un mouvement d’extrême droite mais n’empêche pas de le penser. Pour l’antiparlementarisme, les velléités permanentes venues de l’olympe visant à modifier la constitution pour réduire les prérogatives du parlement n’ont pas besoin d’être développées. Quant à l’autoritarisme, que dire. Entre les lois de celui qui n’a même pas réussi à s’appeler Christophe et les discours de celui qui s’appelle Christophe mais qu’on surnomme plutôt Kéké, les menaces du dieu des dieux, lui-même, contre les gens qui manifestent et le couvre feu qui devient la loi commune, il y a suffisamment d’exemples de ce que la déclinaison autoritaire peut donner. Et tout cela, dans le but de protéger le peuple contre lui-même. C’est beau le self défense, le MMA. Pour l’instant, il semblerait qu’on échappe encore aux doctrines basées sur la race. Il semblerait que ce soit trop visible. Quoique, tout de même, il ne fait pas bon être juif, black, asiatique, beur ou blanc. Enfin, blanc, ça passe, si t’as du pognon et que tu t’appelles Richard, Bruno ou Gérald, sinon, rien ne passe et ne t’avise surtout pas d’être une femme ! La quatrième expression est partiellement remplie mais avec quelques petits efforts, la promotion d’une secte sur le reste de la société devrait pouvoir se faire assez vite.
Toutefois, la vraie distinction, l’élément définitif qui fait que, non ! Grand dieu ! Non ! Jupiteux n’est pas l’extrême droite, c’est que lui, jamais ! Oh grand jamais !, il ne critiquera le capitalisme ou le libéralisme. Jamais ! Jupiteux, c’est le général chilien, sans armée, mais avec des courtisans tout le tour du ventre qui n’ont comme autre obsession, que leur poids. Eux, ils sont au pain et à la brioche. La classe à Dallas. Et cette comparaison avec la république de Valparaiso n’est pas fortuite. L’homme-enfant, fils de sa femme, est en réalité le petit fils de Milton. La libéralisation totale de l’économie, des échanges et de la concurrence. L’open bar du miracle des guides de windy town. C’est en cela que les perspectives réac sont mises en place. Utiliser des méthodes qui furent un échec sanglant pendant une quinzaine d’années et les appliquer avec l’assentiment d’aveugles qui s’efforcent d’être sourds. Alors, nous ne sommes pas encore tombés dans une dictature de droite parce que les aveugles veulent absolument nous rassurer à coup de : « Puisque tu peux le dire, c’est que nous sommes en démocratie ! ». Comme si la démocratie se limitait à une liberté d’expression beaucoup moins libre que la liberté de baisser la tête et d’accepter que des roquets incompétents et méprisants méprisent ceux qui n’ont pas d’autres choix que d’accepter les choix qui furent faits pour eux, par d’autres. Ce qui va devenir notre choix, c’est : accepter ou accepter et, à notre tour, devenir sourds au royaume des aveugles. Il ne faut pas se débattre avec les partisans du haineux toujours au dessus des yeux, c’est mal, il vaut mieux ne rien faire et critiquer les poissons qui se débattent en dehors des eaux et devenir aveugle au royaume des sourds.
La semaine politichienne de Smig – L’assentiment d’aveugles qui s’efforcent d’être sourds
Il fait 5 degrés le jour, et les températures sont négatives la nuit. Pourtant, certains, parmi nous, se rassemblent sur les ronds-points. Selon les autorités (mais pouvons-nous considérer qu’un joueur de poker représente une quelconque autorité ?) et les commentateurs des salons d’excellence, qu’ils soient parisiens ou provinciaux, il ne s’agit que de gens d’extrême droite avec des revendications uniquement liées au prix du gasoil. Il ne semble pas nécessaire de développer davantage pour mesurer le mépris, la méconnaissance et le décalage qui existent dans la vision donnée de cet agglomérat disparate nommé peuple. Il y a aussi certains intellectuels, ou considérés comme tels, par d’autres intellectuels, qui les considèrent comme tels, parce que, eux-mêmes, considérés comme tels, par les mêmes, qui les considèrent comme tels, qui préfèrent s’interroger sur la notion même de peuple. Il y a donc des gens qui cherchent à définir ce qu’est le peuple et de mettre une définition dans le dictionnaire pendant que des vrais gens se rassemblent et ne représentent qu’eux-mêmes, c’est-à-dire une frange négligeable et détestable de la population parce que, supposée d’extrême droite et qui, finalement, ne représente rien, si ce n’est qu’eux-mêmes. Cette frange s’appelle le gouvernement. En effet, il ne fait que s’auto représenter, représente une minorité, est d’extrême droite et la majorité des gens n’a pas envie de le suivre.
Pour des raisons qui échapperaient à la conscience de n’importe quel individu doté d’un minimum de recul cognitif, il est interdit de considérer ce rassemblement de promeneurs endimanchés et goguenards comme le versant le plus violent de ce que la politique peut réserver. Or, la marche devient un sport violent et même extrême et seuls ceux, qui ont réussi à s’acheter, au préalable, un canapé pour rester assis, ne le voient pas. Il y a donc ceux qui restent dans leur standard cosy de vie propre et établie, qui appartiennent à ce que les élections ont déterminé comme représentants. Il y a ceux qui marchent en réclamant l’instauration d’un régime totalitaire incarné par un bellâtre juvien et une équipe de 30 suiveurs dont 32 sont des incompétents et des escrocs notoires et qu’on nomme gouvernement et qui symbolise ce que l’on peut imaginer de l’extrême.
L’extrême droite se caractérise par la mise en avant d’un nationalisme exacerbé. Certains flâneurs primesautiers considèrent que l’UE est une nation et que cette nation doit être forte. Ils envisagent de la doter d’une armée, d’un budget, d’un gouvernement. Une sorte d’empire de Star Wars avec Moscovici ou Barnier en Darth Vador d’opérettes mais aux brushings impeccables, et un empereur Palpatine, en lien avec Jack Daniel’s et le clan Campbell, qui gèreraient les affaires de l’empire sans rendre de compte à personne. C’est ce que nous avons et dans chaque région de cet empire napoléonien, un représentant de l’empire marche vers le contrôle toujours plus absolu. Les chefs de section sont nombreux et travaillent à l’unisson vers un monde meilleur, qu’ils se nomment Jupiteux ou Flamby, Tsipras ou Renzi, Merkel ou Rajoy, les missions sont claires et simples. Instaurer le pouvoir d’une oligarchie consanguine et non élue, et ça marche avec le soutien de ceux qui se considèrent comme des révolutionnaires parce qu’ils ont empêché la peste brune d’envahir les contreforts de la nation et qu’ils crachent vertueusement sur ce « peuple » qui exprime juste la difficulté de souffrir en silence. La première expression de ce qu’est l’extrême droite est remplie à son paroxysme. La nation européenne.
La seconde expression est la manière radicale avec laquelle ce nationalisme est formulé. Prenons une petite partie de cet immense empire, une partie contrôlée par un subordonné juvien. Afin de maitriser l’expression, on gère ce qui est de l’ordre du médiatique dans un premier temps. On place à la tête des institutions d’état des collaborateurs zélés et missionnés pour appliquer les consignes divines. Afin d’être certain que la dissidence n’ait pas voix au chapitre, on rédige un pan législatif donnant la possibilité de déclarer certaines sources comme illégitimes et on donne un nom latin, ça fait plus empire (Decodex), mais aussi de dénigrer les vecteurs d’infos avec des principes apparaissant bienveillants et sécurisants dit de loi faiqueniouse. Désormais, il faudra dire, écrire et montrer, ce que le gouvernement impérial considèrera comme recevable par la population d’abrutis, si facilement gouvernables, finalement. C’est mon ami, mon frère, mon valet, qui diffuse les informations, qui surveille les informations diffusées par les autres et qui interdit les informations diffusées par les autres si elles ne respectent pas la doxa que j’ai fondée. La manière radicale est, pour le coup, radicale, d’autant que les différents médias survivent grâce aux subventions impériales et que, la sortie de route, s’accompagnerait, fort logiquement, d’une fin de non recevoir quant aux paiements de ces dites subventions. La seconde expression de ce qu’est l’extrême droite est remplie à son paroxysme. Les medias sous contrôle.
A suivre…
J’ai fait avec les moyens du bord de la falaise 8… 21
« C’est vite devenu une drogue. Même si j’avais voulu m’en débarrasser, j’aurais échoué. Ce n’est pas tant que j’étais accro à lui, c’était juste que je ne pouvais pas vivre sans. Sa présence ne m’était pas indispensable. Ce n’est pas lui qui me tenait accrochée, c’est plutôt ce qu’on vivait. Tu vois, aujourd’hui encore, je ne sais pas pour qui il votait et même s’il votait, par exemple. Par contre, je me souviens qu’il m’a prise sous la pluie, sur un pare choc de vieille bagnole, dans Paris. Je me souviens que nous avons fini au poste parce que les gens n’aiment pas voir d’autres personnes baiser dans la rue. C’est paradoxal d’ailleurs. Les gens se tripotent devant des films de boules mais dès qu’il y a des vrais amateurs qui pratiquent, ils appellent les mœurs. Je me souviens des regards amusés de mecs, qui allaient devenir des collègues, alors que nous étions débraillés et encore puants de désir, et des mines emplies de jalousie des nanas qui ne parvenaient pas à rester neutres, dans leurs affects. Nous nous étions envoyés en l’air partout et même ailleurs et même nulle part, pendant six mois. Dans tous les sens et à des rythmes de chiens en rut, partout, à n’importe quelle heure et encore et encore. Cette histoire ressemblait à une partouze géante à deux. Je n’ai appris son prénom que deux semaines après nos retrouvailles. Aujourd’hui encore, je ne crois pas que j’ai connu son nom de famille mais je peux te décrire chaque parcelle de sa peau, le goût, l’odeur, la texture de toutes les parties de son corps, de la plus visible à la plus trash. Je connais son corps par cœur parce qu’il est à moi. Il était façonné par mes mains, construit par mon regard. C’est ma langue qui dessinait la courbe de sa silhouette. On était dans une sorte de magie, de bulle sexuelle. Un truc où la chose qui compte vraiment est de se foutre à poil et de s’envoyer en l’air. Il n’y avait aucune promesse, il n’y avait que des corps qui se mélangent en permanence et qui en redemandent. Je savais peu de lui mais je savais ce que je voulais savoir. La chaleur de sa queue en moi, le rythme de ses hanches pendant qu’il s’évertuait à me faire jouir en se donnant un mal de chien alors que je jouissais et que j’en redemandais même. Je n’en avais jamais assez, il n’en avait jamais assez. Nous étions dans ce partage des corps qui fait que le reste n’existe pas parce qu’il n’a pas vraiment d’importance, du moment qu’on est à poil. «
J’ai fait avec les moyens du bord de la falaise 5 quarto… 18 quarto
« Très vite, peut être trop vite, la tension sexuelle entre nous, sur ce trottoir balayé par le vent et la pluie d’automne, faisait qu’il fallait agir. C’était animal, irrationnel, incompréhensible mais il fallait, à ce moment là, que nos corps se rencontrent. J’avais compris que ce vernissage avait un sens particulier pour lui mais j’avoue que je n’avais pas prêté attention à ses mots. Il parlait mais j’étais trop séduite, trop hypnotisée par ce qu’il était, ce qu’il dégageait que je ne sais plus ce qu’il disait mais il semblait inspiré, envoûté, comme si cette soirée était l’acmé de la vie qu’il menait. L’apogée d’une existence compliquée et même finalement confuse. Je ne sais plus comment nous avons traversé la grande salle dans l’autre sens, s’il me tenait la main ou pas; je sais juste qu’il était devant moi. Il prit le chemin d’un escalier exigu avec les peintures qui craquelaient au plafond et les inscriptions à caractère faussement philosophique peinte de manière anarchique sur les murs en peinture noire et au dessin d’écriture manuscrite. Au bas de cette trentaine de marches, le palier offrait deux accès. Je pris cette course vers les toilettes comme un reproche silencieux et une envie tue de sa part de me refaire une beauté. Il me laissa me diriger vers la porte des toilettes pour femmes. Je lui tournais le dos mais je ne sentais pas cette fois son regard me dévorer comme je l’avais senti avant. Et là, je sens soudain une main m’agripper l’épaule droite et me retourner brusquement. Deux mains m’attraper le visage avec force et délicatesse à la fois et ses lèvres se poser sur les miennes, sa langue chercher la mienne et déjà ses mains partir à la découverte de mon corps. Il commence à reculer et je ne comprends pas tout de suite son projet, sa jambe se lève et sans regarder, son pied ouvre la porte des toilettes pour hommes et je sens qu’il m’attire à l’intérieur. Je n’envisage à aucun moment de résister ou de me débattre et j’accompagne même plutôt son mouvement. Il arrête de m’embrasser mais laisse sa main sous mon chemisier. Oui, pour un vernissage je porte un chemisier… »
Je compris que je devais avoir relâché mon regard de concentration intense pour qu’elle me prenne à parti soudainement alors que je ne disais plus rien depuis un moment. J’étais revenu plusieurs années en arrière, sur ce quai du métro à revoir encore et encore le photomaton de Géraldine et à rester devant le désarroi des parents et ma propre incompétence à ne pas comprendre le message que cette jeune fille voulait me faire passer et qui allait hanter ma vie. Je voulais depuis tellement longtemps comprendre le sens de cette déclaration. Savoir ce qu’elle voulait me dire, ce qu’elle voulait dire au monde et que seul moi avais la possibilité de comprendre. Mais je restais dans le flou absolu et total depuis tellement longtemps que ce brouillard faisait parti de moi désormais.
« J’étais contre le mur, un pied posé sur la cuvette des chiottes et les pans de la jupe droite de mon ensemble bon marché mais qui me donnait l’air d’appartenir à un monde qui n’était pas le mien, relevés. La culotte n’avait pas résisté longtemps a ses assauts et j’imagine qu’elle était particulièrement humide tellement j’étais sur excitée. J’aurais voulu jouer la femme respectable et inaccessible comme il faut faire quand on veut être respectée mais c’était déjà bien trop tard. J’attendais maintenant fébrilement qu’il daigne achever ma souffrance et que la libération mutuelle vienne rapidement. Bon, j’avais espéré que cela durerait un peu plus longtemps quand même… J’espérais que la libération ne serait pas aussi rapide. trop d’excitation, trop d’envies, trop de désir, trop de chaleur, et forcément l’explosion arrive, immédiate, incontrôlée, incontrôlable. Lui comme moi devions jouir et expulser ce que nous retenions en nous et qui compressait nos estomacs. J’entendais furtivement les bruits de pas dans les toilettes pour les hommes, les jets d’urine dans les pissotières, les talons et semelles de chaussures vernies, hors de prix, sur le carrelage ciselé, le débit des robinets et les sèche mains crachant à pleins poumons leur air surchauffé. Je retenais mes cris en mordant la paume de ma main alors que mon bras enroulait son cou. Il retenait ses râles d’efforts et de plaisir en haletant fort mais de façon muette. Une baise de film de catégorie B dans l’image mais une putain de jouissance dans les faits. Ce fut furtif, court, intense, doux, chaud, violent et totalement désordonné. J’étais à la fois déçue, comblée, flattée et émue. A partir de cet instant, la seule chose que je voulais dans la vie était de recommencer. «
La semaine politichienne de Smig – Le sommeil des dieux est non négociable 2
Le reste est silence sauf que, parfois, il faut aussi savoir dire les choses et, comme c’est moi, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur la situation de l’UE qui devient, chaque jour, un peu plus insupportable. L’Italie ne refera pas un autre budget et Mosco se fait des cheveux parce qu’il va être bien emmêlé dans ses mèches brunes à expliquer ça à l’alcoolique défiscalisé du grand duché. La Hongrie est définitivement un état facho mais démocratique. Ils sont forts les magyars, ils inventent des concepts politiques sans en parler à personne et pis c’est tout. La Pologne aussi est facho mais autrement, tout comme la République Tchèque, la Bulgarie la Roumanie mais ce sont les électeurs qui sont des cons. C’est différent, c’est pas pareil.
Dans le même temps, les mois de novembre sont meurtriers pour les derniers jours de May, mais pourquoi les électeurs anglais qui auraient choisi le Brexit seraient forcément des gens non informés, crédules, indifférents et non impliqués? Pourquoi les politiques qui veulent sortir de l’UE seraient forcément des irresponsables démagogues? Pourquoi, à aucun moment, il n’y a de remise en cause par les européistes des errements de l’UE qui amènent à ce type de vote? Pourquoi est-ce toujours la faute des électeurs et jamais la faute des politiciens? Si les anglais ont voté pour le brexit (et même s’ils sont stupides et inconscients) c’est peut être aussi parce que l’UE ne remplit pas les promesses que les européistes passent leur temps à proférer sans jamais les tenir ni rendre de compte. Donc, on (les gens qui ont tout compris, qui sont supérieurement intelligents, qui eux, votent bien et devraient avoir le droit de vote exclusif parce que hein) considère que les électeurs sont dénués de libre arbitre. Les anglais qui ont voté pour le brexit sont donc des décérébrés qui suivent bojo ou farage sans la moindre once de réflexion. En gros, il vaut mieux supprimer le droit de vote puisque les imbéciles sont majoritaires. Au moins, ainsi, on sera tranquille. Il y a eu des mensonges, c’est avéré mais quelle campagne électorale n’en comporte pas? Macron n’a t-il dit que la vérité? Salvini ou Di Maio n’ont-ils dit que la vérité? Et en face, Renzi n’a dit que la vérité ou Le Pen? C’est le propre de la campagne électorale de donner à entendre ce que les gens veulent entendre. Les brexiters ont profité d’une faille, c’est immoral mais c’est le jeu politique depuis des décennies. Et s’il y a faille, peut être qu’il serait intéressant de s’intéresser à celle-ci, plutôt qu’à reprocher aux électeurs d’avoir exprimé une opinion. Il est trop simple de considérer les électeurs comme des fachos stupides, c’est tout. Que les élites ou les politiciens ou ceux qui détiennent le pouvoir continuent à le croire et ce type de vote sera de plus en plus fréquent. Lors d’une défaite, il y a deux attitudes possibles, soit dire que c’est la faute de l’autre qui a triché, soit se dire qu’on a commis des erreurs. Pour l’instant, ça n’est que la faute de l’autre apparemment. L’UE a cette fâcheuse capacité à montrer à l’univers entier que les gens votent mal, que les gens pensent mal, qu’ils ne sont pas dignes de voter. Petit à petit, on fait comprendre, insidieusement, que le vote ne devrait être confié qu’à des personnes aptes à commettre cet acte. La peine de vote. Finalement, le vote n’apparait plus que comme l’enregistrement d’une décision déjà actée. Ce ne sont que les votes qui ne conviennent pas qui sont remis en cause ou occultés. Voter Brexit, c’est mal, il faut refaire un référendum. Voter pour le dieu déchu, c’est bien, il ne faut même pas envisager contester le résultat. Voter dans un référendum à l’encontre de l’opinion bruxelloise, c’est mal alors on fait comme si le vote n’avait jamais existé parce que, après tout, il y a eu tout plein de changements de ponctuation dans l’accord et que les électeurs, en vrai, y z’ont pas compris. Le sommeil des dieux est non négociable.
La semaine politichienne de Smig – Le sommeil des dieux est non négociable
Tant va la cruche à l’eau…. Et à la fin, c’est toujours l’Allemagne qui gagne. Soudain, le grand empire juvien se fissure sous les coups des gilets de sauvetage. Jusqu’ici, rien n’impliquait que l’on se penchât sur ce phénomène. Certaines personnes n’étaient plus satisfaites d’une société qui est, pourtant, simplement dans la continuité de ce qui se fait depuis des décennies mais, soudain, la goutte d’eau, qui n’est en réalité que la énième versée, devenait imbuvable. A aucun moment, les pompiers pyromanes ne s’interrogèrent sur leur propre responsabilité. Toujours la faute des prédécesseurs, de ceux d’avant mais là, ceux d’avant, ce sont ceux qui sont toujours là alors, forcément, ce discours devient compliqué à défendre. Demain, des gens, de simples gens, vont manifester, bloquer, marcher (ironie quand tu nous tiens), pour signaler finalement, simplement qu’ils existent.
Ce gouvernement des nuages a réussi l’exploit, à travers des phrases ineptes et des comportements déplorables et répétés, à accentuer la contestation. Une gestion toute en contritions tardives, en mea culpa larmoyants et en passages médiatiques tous plus pathétiques les uns que les autres afin de continuer cette fameuse cristallisation qui intervient la nuit pour ceux qui savent et qui ramènent les jours les moins clairs à une vitesse non plus de marcheurs blancs mais plutôt d’hélicoptères de ministre de l’écologie se posant joyeusement dans un lieu sauvage pour serrer la pince à des ours réinstallés.
Il eut été tellement plus sage de prendre acte du mécontentement, de travailler, enfin, à satisfaire le peuple votant ou, au moins, encore une fois, à ne pas l’humilier davantage. Mais non. Il faut le menacer, d’une part. Lui dire que la moindre action pourra être réprimée et sera condamnée et il faut, d’autre part, insister lourdement sur la récupération politique inexistante d’un mouvement, pour le discréditer, avant même qu’il n’existe. Alors demain, enfin, les fachos seront identifiables. Tous les extrémistes de droite seront vêtus de gilets jaunes. C’est ce que le Hermès des temps modernes veut faire falloir, sans lui le 17, parce que Jupiter est en souffrance comme tout est incontrôlable mais si les choses échappent, c’est peut être qu’elles ne sont pas contrôlées et si tel est le cas, alors, à qui la faute ? Et qui est appelé à contrôler cette jacquerie puisque c’est le mot à la mode ? Le joueur de poker ou la flamme sur la place publique ? Il n’était pas prévu que demain un facho comme moi aille faire bronzette sur un quelconque piquet de blocage avec bbq et fumigènes mais les dernières menaces du joueur de poker inutile et du porte parole sournois futur ex maire utopique de la capitale ainsi que les différentes torches lancées par le « sans moi le 17 » m’incitent à reconsidérer ma position et à assumer définitivement ma position de rouge brun comme le nomment certains en faisant un tour nonchalant parmi les gilets moches de survie en milieu hostile.
Alors, on annonce l’argument écologique. La nécessité de supprimer le fioul, l’essence et le diesel et de passer au tout électrique. C’est Marcel François qui, en grande pompe, sur tous les médias qui veulent bien encore accueillir la voix éraillée des mensonges abscons, réclame, en urgence, qu’on fasse appel, massivement, à son futur ex employeur nucléaire pour nourrir cette masse électrique. Il faut, et c’est le message de l’écologiste druckerien, sortir au plus vite du nucléaire, en privilégiant l’électrique produit par la maison mère énergétique du gouvernement, AREVA. Le dieu des dieux avait annoncé qu’il n’était pas opposé aux lobbies, loin de là. On vérifie finalement, chaque jour, la véracité de cet adage mais surtout, surtout, il ne faut pas faire de vagues, ni jaunes ni d’une autre couleur. Le sommeil des dieux est non négociable.
J’ai fait avec les moyens du bord de la falaise… 5 ter… 18 ter
Il y avait ce souvenir qu’elle me racontait et que j’essayais d’écouter. Vraiment, j’essayais. Si je n’avais pas eu cette obsession, à ce moment là, autour de l’image de Géraldine, je crois même que j’aurais réagi lorsqu’elle commença à vouloir exprimer des détails que je n’avais pas envie d’entendre finalement mais je savais que cela n’aurait servi à rien de lui demander de se taire ou de montrer une mine renfrognée. Elle devait vider son sac. Je ne sais pas pourquoi mais elle le devait.
« Tu vois, je t’ai dit que cette voix m’avait susurré: ‘Il n’y a rien, ici, de plus délicieux ou désirable que vous’, dans le creux de l’oreille et que j’avais senti monter en moi un mépris quasi dangereux vis à vis de cette ringardise crasse. Pourtant, dès que je me suis retournée, j’ai su que tout allait changer. Il était là, face à moi, ses cheveux tombant en boucle frisée sur ses épaules. Il y avait un côté féminin, précieux dans ce visage et sa forme osseuse et allongée. Son regard sombre me pénétrait littéralement, vraiment l’impression d’être transpercée. Il ne lâchait pas sa proie du regard, même s’il savait qu’elle lui appartenait déjà. Il resta ses yeux plongés dans les miens un moment qui sembla une éternité, mais une éternité douce et jolie. Pas une éternité dans la mine à pousser des chariots. Un truc chaud, doux, agréable. Je ne sais plus s’il y eut des mots échangés. Dans mon souvenir, ce moment d’éternité fut silencieux et les yeux dans les yeux, tous les mots se prononçaient en silence et de manière sourde. Aucun souvenir de ce qui s’était dit à cet instant, si ce n’est qu’il m’invita à fumer une cigarette sur le trottoir, puisqu’on ne fume plus en intérieur depuis longtemps déjà. Il pleuvait. Il faisait froid. Je ne fumais pas. Il me prit la main et cette main chaude sur la mienne ne fit qu’accélérer les battements de mon cœur et oublier les contraintes et les excuses que j’aurais pu trouver pour ne pas y aller. Une sorte d’éblouissement dans les yeux à travers cette main. Son pouce passait sur le dos de ma main et envoyait, à travers tout mon corps, des décharges électriques de plus en plus violentes. La traversée de la grande salle d’exposition, ma main dans la sienne, fut le premier instant magique d’une relation qui partait pour plusieurs années, mais, à cet instant, la seule chose qui comptait pour moi, c’était ma main dans la sienne. Personne ne nous regardait ou tout le monde nous voyait. J’étais à la fois, transportée par la magie du moment, et amnésique aux alentours et au monde autour. Au milieu de cette lumière sur exposée des expos contemporaines, on traversait à grands pas les groupes de gens endimanchés et qui parlent pointu, les verres de breuvage pétillant dans une main et les petits fours multicolores dans l’autre. Je me prenais pour la star du moment et du lieu alors que j’ai bien conscience que tout le monde s’en foutait de notre délire d’adolescents attardés. Nous traversions morts de rire un monde de bienséance auquel, finalement, nous n’appartenions pas. Tout le monde nous voyait, personne ne nous regardait. Il ouvrit la porte et me laissa passer. Je savais qu’il en profitait pour mater mon cul et j’avoue que cette sensation me plaisait. Je sentais déjà son désir et j’aimais savoir que je lui faisais cet effet. Il me voulait et ça tombait bien, je le voulais aussi. »